2 questions sur le film de Pier Paolo Pasolini "Oedipe Roi".
[...] La pièce de Sophocle, dont la psychologie (à partir de Freud) a retenu essentiellement la relation incestueuse d'un fils avec sa mère et l'assassinat du père (qui la rend possible), porte davantage sur la double signification de « voir » : « voir » avec les yeux, « voir » dans le sens de comprendre. Ceux qui voient avec leurs yeux (ici, Œdipe), sont incapables de comprendre, ceux qui sont privés de la vue (Tirésias), comprennent. « Comprendre » est pris dans le sens de « connaître », se connaître soi-même, savoir qui on est, qui on a été. Un deuxième thème traité dans pièce est celui de la liberté, du libre arbitre. L'opposé du libre arbitre est le destin, la volonté divine. [...]
[...] Le plus puissant est donc entre les mains du plus humble. Même doublement roi (un messager de Corinthe vient annoncer à Œdipe qu'il a été choisi comme roi), le sort d'Œdipe est suspendu à la parole d'un esclave. Le messager arrivé de Corinthe instruit Œdipe davantage : Polybos, le roi mort, n'était pas son père, c'était ce même messager qui avait trouvé Œdipe dans les montagnes, les pieds liés, entre les mains d'un pasteur, qui n'était autre que l'esclave ayant fui le cortège de Laios lors de sa rencontre avec Œdipe. [...]
[...] Œdipe est souvent aveuglé par le soleil dans son passage à l'Oracle d'Apollon (où il se rend parce qu'il avait été accusé de bâtard à Corinthe, pour savoir ce qu'il y avait derrière cette invective). Il se couvre les yeux, voit trouble. Il hésite lorsqu'il voit la direction de Corinthe (la ville de ceux qu'il croyait être ses parents) et prend celle de Thèbes à la place, pour échapper à la prédiction. Un texte incrusté traduit sa pensée, comme l'aurait fait le chœur dans la tragédie grecque. Il se demande, lorsqu'il tourne sur lui-même, « Où va ma jeunesse, où va ma vie ? » Il ne « voit » pas. [...]
[...] La fragilité morale du pouvoir est ainsi mise en scène. Le serviteur ayant fui lors du combat d'Œdipe contre le cortège de Laios viendra confirmer ce qu'Œdipe entrevoit dans les réponses que lui fait Jocaste à propos de la mort du roi (le lieu, l'aspect de l'ancien souverain). Œdipe dépend donc, pour découvrir la vérité, du plus humble de ses sujets. C'est ainsi un esclave qui aura le pouvoir de détruire par ce qu'il sait le plus puissant des Thébains (Œdipe). [...]
[...] Elle donne l'impression de ne pas se laisser voir, de cacher son intériorité derrière le fard. Après l'installation d'Œdipe dans le trône, la peste arrive, Œdipe envoie Créon à l'Oracle pour savoir ce qu'il convient de faire pour l'arrêter. Lorsque Créon revient, il rapporte la voix de la sagesse : « Ce que l'on veut savoir existe ». « Savoir » est l'équivalent de « connaître » (« voir »), Tirésias reprochera à Œdipe qu'il ne veuille pas connaître la nature qui est en lui, le déclare coupable des maux qui affligent Thèbes parce qu'il « ne veut pas voir ». [...]
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