Qu'ils aient écrit dans la prison lorsqu'ils y séjournaient ou sur la prison après en être sorti, de nombreux auteurs ont fait de la prison un motif central dans leur oeuvre. Lieu d'enfermement et de privation de liberté, la prison exclut de la société celui qui y est condamné.
[...] Par conséquent, la poésie est une désobéissance formelle : l'évasion interdite au prisonnier est malgré tout réalisée par le poète grâce à ses poèmes Dire l'absurde Dans l'univers carcéral ou les pratiques sociales s'abolissent du fait des contraintes d'espace et de temps, le langage poétique constitue une façon de continuer à utiliser la langue. Dire comme Apollinaire « Le ciel est bleu comme une chaîne » constitue bien entendu un non sens littéral. De la même manière, rentrer dans la tombe au lieu d'en sortir comme le fit Lazare est une renversement fort de l'image, une inversion du sens. [...]
[...] Autrement dit, le poète fait de son enfermement un objet de réflexion et de création littéraire, ce qui permet une forme de mise à distance. En outre, la reprise du motif de la tombe sous la forme d'une comparaison avec la prison permet d'évoquer le thème de la renaissance, esquissant peut-être l'idée que ce qui permet la résurrection du poète n'est pas tant la tombe que la poésie elle-même. Dans cette perspective, il faut voir dans la création poétique une forme de désobéissance de l'esprit aux lois de la prison : le corps est certes contraint, mais l'esprit reste libre, et la preuve de cette liberté est l'acte poétique lui-même. [...]
[...] Une tension créatrice entre contrainte physique et liberté d'écriture 1. Une manifestation de l'identité Dans un lieu d'enfermement qui souvent réduit le détenu à un simple matricule, l'identité individuelle est fortement menacé. En cela, l'écriture constitue un geste qui permet de manifester à nouveau une singularité, et, par cette singularité, une résistance au sentiment d'uniformisation que produit la prison. Lorsque paraît en 1898 La ballade de la Geôle de Reading sous le pseudonyme C c'est en réalité Oscar Wilde qui use de son matricule de prisonnier comme d'un nom de plume. [...]
[...] Avant lui, le poète français François Villon avait intitulé son dernier recueil La ballade des pendus. On voit donc bien comment se noue la relation entre la poésie comme acte de liberté et la prison comme limitation du corps. C. La prison, métaphore du langage ? S'échapper du carcan de la langue 1. Un langage créateur D'un point de vue stylistique, on peut aussi analyser la prison comme une analogie avec langage prosaïque, dont se libère le poète en pratiquant l'écriture. [...]
[...] L'expérience carcérale comme moteur à l'invention poétique Qu'ils aient écrit dans la prison lorsqu'ils y séjournaient ou sur la prison après en être sorti, de nombreux auteurs ont fait de la prison un motif central dans leur oeuvre. Lieu d'enfermement et de privation de liberté, la prison exclut de la société celui qui y est condamné. En cela, cette peine n'est pas sans rappeler la place que s'assigne le poète — surtout romantique — dans la société contemporaine : une place à part, en dehors de la société qu'il observe. [...]
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