La représentation du lieu urbain des auteurs Kafka, John Dos Passos, Louis-Ferdinand Céline et Pierre Sansot

Thèmes abordés

Phénomène urbain, ville, États-Unis, New York, Américains, immigrants, modernité, rêve américain, statue de la Liberté, individualité, métropole, inégalité, indifférence, solidarité, pauvre, riche, transport

Résumé du document

Dans l'Europe du début du XXe siècle, une prise de conscience du phénomène urbain commence à émerger. La ville est un sujet au coeur d'oeuvres telles que Amerika ou le Disparu, de Kafka, Manhattan Transfer de John Dos Passos et Voyage au bout de la nuit de Louis-Ferdinand Céline. Les trois ouvrages ont en commun de se dérouler aux États-Unis et notamment dans une ville qui est considérée à leur époque comme un modèle de référence par sa modernité : New-York. Mais il y a deux New York, celui des immigrants comme Karl Rossmann ou Bardamu et celui des Américains. L'immigrant arrive plein d'espoir, mais aussi de peurs et de représentations de ce que sera sa vie dans l'espace urbain, en tout cas sa vie s'en trouvera significativement modifiée. Pierre Sansot écrit dans Poétique de la ville : « Le véritable lieu urbain est celui qui nous modifie, nous ne serons plus en le quittant, celui que nous étions en y pénétrant ».

Extraits

[...] Il est comme pris dans la toile de la grande ville et ses structures bureaucratiques qui l'écrasent. C'est un univers nouveau où l'unicité de la personne n'est pas considérée. Conclusion « Le véritable lieu urbain est celui qui nous modifie, nous ne serons plus en le quittant, celui que nous étions en y pénétrant » écrit Pierre Sansot. Les personnages des romans étudiés voyagent à destination de la grande métropole américaine, la tête et le cœur emplis d'espoir, cependant la confrontation à une réalité qu'ils étaient loin d'imaginer modifie leurs façons d'être et de penser. [...]

[...] Non seulement il se sent comme n'étant rien au milieu de la foule, son individualité n'est plus qu'une ombre, mais lorsqu'il essaie de communiquer il est tout aussi invisible. En effet, lorsqu'il demande à des personnes ce qu'est le bâtiment qu'il voit, il n'obtient aucune réponse : « la plupart feignirent de ne pas m'entendre. Ils n'avaient pas de temps à perdre » (p.193). Chez Dos Passos, l'individu est broyé : « des hommes et des femmes se pressent, écrasés, bousculés, comme des pommes qu'on fait rouler dans un pressoir » (p. ; la comparaison avec des fruits dans ce contexte ramène à une déshumanisation. [...]

[...] Quant à Joe Harland, il devient sans domicile fixe. L'individu évolue dans une indifférence la plus totale. C'est comme si la misère était invisible. Alors que dans la vie rurale, les personnes se connaissent, se disent « bonjour », dans la grande métropole américaine l'indifférence et l'anonymisation sont de mises. Karl Rossmann découvre rapidement après son arrivée à New York que ce qu'il avait lu à propos du règne de l'indifférence dans la ville est exact : « ici, il ne fallait pas espérer de la pitié, [ . [...]

[...] Cette temporalité au rythme accru se retrouve aussi dans le travail. Lorsque Karl visite la salle des téléphones, la description nous évoque une ruche au rythme infernal : « un employé indifférent à tout ce bruit de portes, [ . ] régnait un va-et-vient constant de gens pressés. Personne se saluait » (p.62). Dans les transports, au travail, semble régner une frénésie, une course contre le temps. En outre, ce qui compte ce n'est pas tant la valeur et le courage, Karl qui travaille sans compter comme liftier se fait malmener et licencier. [...]

[...] Il pense alors : « Et papa qui voulait me faire rester dans son vieil idiot de magasin à Onteora » (p. 21). Le personnage dénigre alors ses origines. En comparaison de cette grande ville où il est venu s'installer, Onteora lui apparaît presque comme ridicule. Le mépris de l'Europe se lit également : « quel enfant démodé » (p. 21). La métropole américaine attire, elle incarne ce grand champ des possibles par opposition aux petites villes qui prennent un air désuet. Pour ce qui du héros de Céline, Bardamu, la représentation qu'il se fait de ce continent est idéalisé. [...]