Jalousie, oeuvre de Molière, confins du tragique, Sganarelle ou le cocu imaginaire, Dom Garcie de Navarre ou le prince jaloux, Le Misanthrope ou l’atrabilaire amoureux
Le théâtre français à l'âge classique puise grandement son inspiration dans l'Antiquité gréco-latine. Les auteurs se sont fortement inspirés de La Poétique d'Aristote ainsi que de l'Art poétique d'Horace. Au XVIIe siècle en France, le seul genre théâtral prestigieux est sans conteste la tragédie. Nous verrons en effet que la comédie à cette époque cherche surtout à se positionner entre les excentricités de la farce et le sublime de la tragédie. Molière participera activement à ce renouveau de la comédie en hissant celle-ci au rang de « grand genre ».
Jean-Baptiste Poquelin, né en 1622, issu d'une famille de tapissier, se passionne pour le théâtre dès l'âge de 21 ans. Sa rencontre déterminante avec Madeleine et Joseph Béjart l'aide à prendre compte de sa véritable passion. Tous les trois fonde l'Illustre théâtre et Jean-Baptiste Poquelin devient alors Molière. Cependant, la troupe connaît des déboires financiers : celle-ci devient alors itinérante de 1646 à 1658. Grâce à ses nombreux déplacements, la troupe acquière une petite notoriété et lorsque Molière rentre à Paris, le frère du roi décide de devenir son protecteur : l'Illustre théâtre devient alors la « Troupe de Monsieur ». 1659 est une année particulièrement importante dans la vie de l'auteur puisqu'il s'agit de l'année où Les Précieuses ridicules seront jouées pour la première fois : c'est un immense succès qui permet à la « Troupe de Monsieur » de devenir la « Troupe du Roy ».
Molière est alors reconnu comme étant un grand dramaturge.
[...] ALCESTE En recevant mon cœur. Acceptez-le, Madame, au lieu de l'infidèle : C'est par-là que je puis prendre vengeance d'elle ; Et je la veux punir par les sincères vœux, Par le profond amour, les soins respectueux, Les devoirs empressés et l'assidu service Ibid., v. 1234-40. Ibid., v. 1241- Dont ce cœur va vous faire un ardent sacrifice Alceste use d'un vocabulaire bien précis pour toucher le cœur d'Eliante : cœur sincères vœux profond amour soins respectueux empressés assidu ardent Tous ces adjectifs ont pour but de faire croire à la jeune fille qu'il l'aimerait autant qu'il aime Célimène, mais son discours le discrédite aussitôt grâce au terme sacrifice en fin de réplique. [...]
[...] Dès cette première scène, le lecteur/spectateur sait que cette relation est vouée à l'échec : Alceste n'aime personne à part lui-même, il n'aime pas autrui alors comment pourrait-il entrer en relation amoureuse avec une mondaine ? En réalité, Alceste fantasme une relation qu'il ne peut pas entretenir. Il aime l'idée qu'il se fait de Célimène une fois que celleci sera façonnée à son image. Il est dans une illusion de l'amour car la seule chose qu'il aime en Célimène ce sont ses attributs physiques. Sa personnalité ne lui convient pas et il va tout faire pour la changer. [...]
[...] Lorsque Dom Garcie revient à la scène suivante, il voit Done Elvire toute enjouée et cela lui cause du chagrin car il pense que celle-ci se réjouit de son union prochaine avec Dom Sylve. Mais il a totalement changé de comportement, puisqu'il ne s'énerve pas contre la Princesse : il accepte son sort et le choix de Done Elvire. On se rend alors compte que le personnage a grandement évolué, et que, même si sa jalousie n'a pas disparue, il parvient maintenant à la contrôler. [...]
[...] A la scène XVI, lorsque Sganarelle lui apprend que l'homme qu'elle a vu partir, c'est-à-dire Lélie, est l'amant de sa femme, Célie se met donc dans une colère terrible : Est-il rien de plus noir que ta lâche action, Et peut-on lui trouver une punition ? Dois-tu ne te pas croire indigne de la vie, Après t'être souillé de cette perfidie ? O Ciel ! est-il possible ? 77 Célie croit d'autant plus facilement Sganarelle que Lélie ne l'avait point avertie de son retour. Elle comprend donc qu'il s'est fait discret pour mieux dissimuler sa relation avec la femme de Sganarelle. [...]
[...] Le Misanthrope est également une pièce singulière dans la composition de ses personnages. On constaterait d'un côté un couple déchu Alceste et Célimène d'un autre un couple modèle Eliante et Philinte. Tout d'abord, Alceste est marqué par une contradiction intérieure : c'est une misanthrope amoureux d'une coquette. Nous pouvons alors rapprocher cette contradiction de l'analyse de René Bary énoncé ci-dessus. Ce qui rend le personnage d'Alceste totalement singulier dans la veine moliéresque, c'est que pour la première fois, son défaut majeur émane de l'excès d'une qualité : la sincérité, la transparence. [...]
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