Choisir d'évoquer l'engagement d'André Gide en faveur de l'U.R.S.S. durant la première partie des années trente, c'est avant tout se faire l'écho de l'engagement politique particulier de ces hommes et de ces femmes, des intellectuels pour la plupart qu'Arthur Koestler appelait des 'non-aryens', qui mirent tout leur talent et tout leur art au profit d'une cause, celle du soutien à la révolution soviétique, et que l'on surnommait volontiers ironiquement les compagnons de route. Dès lors, comprendre l'engagement gidien pour LA cause et son apostasie presque simultanée ne peut se faire sans auparavant avoir déterminé la singularité du mouvement d'opinions qui porta Gide à se prononcer clairement pour la première fois de sa vie en faveur d'un projet politique
[...] La multitude de voyageurs en partance pour l'U.R.S.S. durant cette période ne pouvait que renforcer le tropisme qui frappait une grande partie de l'intelligentsia occidentale, confrontée à la grande énigme soviétique. Comment, en effet, ne pas résister à l'appel de cette formidable et radicale altérité promise, à cet opium idéologique dont Raymond Aron parla si bien ensuite ? Cherchant un dépaysement par rapport à leurs propres sociétés, les intellectuels engagés devaient, néanmoins, trouver des raisons majeures, des idées directrices pour justifier de leur départ158. [...]
[...] De toute évidence, il avait toujours été pour la vie, pour le mouvement contre la stagnation de la mort. Il tenait l'arrêt de l'esprit sur une institution comme une régression, une faute morale et de ce fait, il assimilait volontiers communisme et révolution (Révolution russe en l'occurrence) à l'avancée de l'Esprit dans l'histoire. Aussi, dans cette optique, la jeunesse soviétique était-elle une sorte d'archétype de la jeunesse sur qui reposait la survie de la liberté et de l'esprit, une sorte d'André Walter au prise avec le sacrifice et les souffrances devant l'avenir128. [...]
[...] Cit août 1934, p Istati, Panaït, Lettre à Romain Rolland in : Les Nouvelles Littéraires, Paris septembre 1933 [reproduit dans Istrati, Panaït, Vers l'autre flamme, Paris, Gallimard, Folio-Essais pp. 250-254] 93 Comme nous le verrons plus avant, Pierre Herbart partagea l'intimité de Gide à de nombreuses reprises de sa vie. Rencontrant l'auteur des Faux- Monnayeurs dans la villa de Jean Cocteau à Roquebrunne en 1927, il maria ensuite Elisabeth van Rysselberghe, la mère de la petite Catherine Gide, la fille d'André Gide Maurer, Rudolf, Op. Cit., p Marty, Eric, André Gide Qui êtes-vous Op. [...]
[...] André Malraux affirmait en 1935 : il est difficile d'être un homme. Mais pas plus de le devenir en approfondissant sa communion qu'en cultivant sa différence La remarque vaut pleinement pour André Gide, un être pour qui tout était paradoxe, et qui cultivait à l'excès le goût de la différence et de la liberté. Paradoxe, en effet, que cet engagement d'un chrétien aux côtés de l'U.R.S.S. athée. Paradoxe encore que cet engagement d'un grand bourgeois aux limites du communisme prolétarien. [...]
[...] Il dût, en effet, laisser son ami souffrant, Eugène Dabit, à Sébastopol. Atteint par scarlatine, celui-ci devait mourir quelques heures plus tard, le 21 août 1936 sans avoir pu revoir la France. Gide écourta alors son voyage sans passer par Odessa et Kiev et revint à Paris le 24 août Un voyage sur mesure : les techniques d'hospitalité Comme le soulignait récemment l'historienne française Sophie Coeuré en parlant de la mythologie soviétique, On voit se dessiner, à partir des documents de l'entre-deux-guerres, un énorme, complexe et étonnant travail d'influence venu de Moscou à destination de l'Occident »183. [...]
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