Tout d'abord, le fantastique qui jusqu'à présent était relégué au second plan devient ici l'élément majeur qui constitue l'intrigue.
Cette affirmation est préparée par un cadre spatio-temporel propice à la métamorphose du tableau.
En effet, le narrateur prépare la venue du surnaturel par un jeu d'annonces et d'attentes du lecteur. Le début de l'extrait souligne un ralentissement temporel. Les gestes du personnage sont détaillés ("Comme il tournait la poignée de la porte"), mais ne sont pas commentés (...)
[...] Elle symbolise le crime commis par l'acte langagier, puisqu'on apprendra plus tard que Dorian a tué Sibyl de ses paroles. Mais elle symbolise également la faculté du tableau à révéler un secret Il contenait le secret de sa vie et en racontait l'histoire D'où la nécessité de masquer le tableau derrière un grand paravent et de mener un plaidoyer pro domo de très mauvaise foi Elle lui en avait tout de même blessé un instant, si lui l'avait abîmé pour plus longtemps Car le tableau, qui semblait pouvoir ôter la culpabilité du vice, devient lui-même moralisateur de par son regard inquisiteur le tableau l'observait, avec son beau visage et son sourire cruel Il devient doué de parole, à travers une sorte de langage visuel, pictural, susceptible de causer la perte de Dorian. [...]
[...] ombre de cruauté dans la bouche est celle qui opère la métamorphose et transforme la peinture. Contrairement au Pygmalion d'Ovide, ce n'est pas Vénus mais le Diable qui donne vie à l'œuvre d'art. Le tableau a comme capté l'atmosphère fantastique de la pièce, et est devenu une structure autonome, si bien que, la lumière renvoyant les ombres dans le royaume des morts coins ombreux le changement du tableau des, lui, irrémédiable. Ces ombres représentent la métaphore du vice venu souiller l'âme de Dorian Gray. [...]
[...] À présent, la mécanique de compensation entre le corps et l'âme est mis en place, et sous-tendra tout le roman. La volonté de Dorian de se replacer sur le droit chemin sera éclipsée par le retour au vice, dès le chapitre suivant, lorsqu'il apprendra la mort de Sibyl Vane. Son désir antérieur de l'épouser se transforme alors, aux yeux du lecteur, en un mariage avec l'Amour et [ . ] la Mort et préfigure la catabase qui mènera irrémédiablement le personnage à sa perte. [...]
[...] Mais, très rapidement, une inversion s'opère, un échange des rôles entre le modèle vivant et le modèle peint. Car le portrait devient périssable, simple mortel ; il a acquis le souffle de la vie. Il perce la frontière entre monde rel et monde du tableau Ses yeux bleus rencontrèrent les siens Ses cheveux clairs brillaient dans le soleil levant De plus, le support matériel n'a pas changé on ne voyait aucun changement dans la peinture elle-même, et pourtant l'expression en avait été indubitablement altérée Le symbole s'est modifié, mais la surface est restée la même. [...]
[...] Le début de l'extrait souligne un ralentissement temporel. Les gestes du personnage sont détaillés Comme il tournait la poignée de la porte mais ne sont pas commentés. Cette succession d'actions presque mécanique, ainsi que la nécessité d'étendre sur quatre phrases l'observation du changement du tableau, suggèrent une forme de somnolence. Nous nous trouvons, avec Dorian, dans une sorte de rêve éveillé, qui annonce la possibilité d'intrusion d'un élément surnaturel. Le temps n'est donc plus celui de la réalité. Il en va de même de l'espace, empli d'une lumière tamisée, terne, atténuée qui modifie la couleur des choses à travers les persiennes de soie de couleur crème Le personnage pénètre dans un autre monde, mais l'intrusion de la lumière vient effacer le fantastique du cadre. [...]
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