Le début du texte donne l'impression d'être merveilleux : en effet, un saint, donc un personnage peu courant "vogue vers les côtes de France". C'est une situation originale. Ce qui renforce le coté extraordinaire, c'est que Saint Dunstan a pour moyen de locomotion une montagne, qui de plus "lui fit de profondes révérences et s'en retourna". La montagne est personnifiée, et l'on se croirait dans un monde différent de la baie de Saint Malo, un monde fait de voyages et d'étonnantes rencontres où l'on croise des "saints de profession" (...)
[...] L'aspect d'une histoire simple et belle se reporte aussi sur le portrait des personnages. Les champs lexicaux utilisés pour le frère et la sœur sont tout deux mélioratifs. Le prieur est quelqu'un de très bon et d'aimé Les habitants ont pour lui une grand considération ; c'est quelqu'un d'instruit car il lit saint Augustin et Rabelais. La sœur, Mlle de Kerkabon a elle un caractère bon et sensible et elle conserve de la fraîcheur à l'age de quarante cinq ans De surcroît, elle est dévote à l'image de son frère le prieur. [...]
[...] L'Irlandais fonde un petit prieuré sur une côte Bretonne ; et Voltaire parle de lui comme s'il était très connu : comme un chacun sait Il y a une contradiction subtile de la part de l'auteur. Lorsque ce dernier raconte l'histoire de Saint Dunstan il utilise un jour alors qu'avec le prieur il utilise le 15 juillet 1689 au soir Une fois c'est très vague, l'autre fois il fait preuve d'une grande décision. A l'aide de l'imperfection des personnages et de ses contradictions Voltaire critique indirectement le monde religieux ou mélange les genres pour s'amuser un peu et/ou brouiller les pistes. [...]
[...] Ainsi à la première lecture nous avons l'impression que c'est un conte qui n'a d'autres visées que distraire les gens. Mais l'étude de l'écriture et de la structure du texte nous révèle un savant mécanisme pour essayer de passer à travers la censure établie à l'époque. A l'image de Voltaire, de nombreux personnages appartenant aux Lumières utilisent des procédés pour que leurs œuvres soient publiées, comme par exemple Montesquieu et son texte sur l'esclavagisme. [...]
[...] Il fait partie des Lumières qui se battaient notamment contre l'emprise des religieux sur la population. L'Eglise établissait une véritable censure sur les œuvres de cette époque ; les artistes devaient alors ruser pour passer au travers. Voltaire a pris soin de situer son histoire en 1689 ; cependant le fait qu'il y ait une censure très stricte nous amène à nous demander comment et pourquoi cet écrit donne-t-il l'impression d'être un simple conte pour qu'il puisse être publié. Nous verrons que cet incipit a tous les éléments nécessaires pour en être un ; mais que l'auteur glisse des détails démontrant les fins de Voltaire. [...]
[...] Nonobstant, Voltaire cache d'une manière astucieuse des éléments qui vont à l'encontre de cette situation. La perfection des personnages n'est qu'apparente. En effet, le prieur est certes aimé de ces voisins, mais l'auteur souligne qu'auparavant il l'avait été de ses voisines ce qui signifie qu'il avait fait chavirer des cœurs. La précision voisin/voisine souligne qu'autrefois il n'était pas très apprécié des messieurs. Peut-être savait-il trop de choses sur les demoiselles ? A-t-il rompu ses vœux de chasteté ? Mlle de Kerkabon n'a pas l'air si dévote qu'il y parait : elle a grande envie d'être mariée et de plus aime le plaisir La fausse perfection des personnages fait partie des détails révélant les vraies intentions de Voltaire qui a glissé quelques contradictions. [...]
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