Dans cet incipit, Voltaire présente les personnages, la situation initiale et le cadre spatio-temporel du début de l'oeuvre. Les éléments traditionnels du conte sont ainsi donnés à lire afin de mieux les subvertir et mettre à jour une réalité décevante cachée derrière des illusions, qui sont ainsi dénoncées. La perspective critique et philosophique est déjà bien présente dès le début de l'oeuvre.
I- La parodie d'un conte
a- Les références traditionnelles du conte
Cet incipit expose un univers de conte traditionnel, illustré par les formules traditionnelles, les éléments spatio-temporels ainsi que les personnages de ce genre littéraire bien codifié et qui fait partie des références culturelles du lecteur.
- Les formules traditionnelles du conte
On retrouve :
.l'expression emblématique du début de tout conte : Il y avait en Westphalie (ligne 1).
.les tendances langagières de tout conte. En utilisant des comparatifs et des superlatifs, Voltaire crée un monde avec des repères simples : les moeurs les plus douces (ligne 2), l'esprit le plus simple (ligne 3), un des plus puissants seigneurs (ligne 9), le plus beau des châteaux (ligne 22), la meilleure des baronnes possibles (ligne 23).
.une caractérisation positive qui passe par la multiplication d'adjectifs mélioratifs comme douces (ligne 2), simple (ligne 4), bon et honnête (ligne 6), digne (ligne 17), bonne (ligne 19), beau (lignes 22 et 29) ... (...)
[...] Les enfants semblent en tout point évoluer sur les traces de leurs parents : le fils du baron, de son père et Cunégonde, de sa mère. - La satire du flatteur Elle s'exprime à travers : .le personnel du château qui rit de l'humour de leur maître (ligne 13) .mais aussi et surtout Pangloss qui vit au dépend de cette famille peu perspicace dont il est l'oracle (ligne 18). Nous avons déjà évoqué la description ironique et faussement admirative du précepteur et de sa philosophie aberrante, elle contribue grandement à cette satire. [...]
[...] Pangloss : du grec tout en langue déjà ironique en lui-même, Voltaire le désigne dès l'évocation initiale par une périphrase ironique : l'oracle de la maison (ligne 18). Puis, il accentue le personnage lorsqu'il s'efface en choisissant le discours direct pour la présentation de la philosophie du personnage (lignes 24 à 32). De cette façon, il souligne son idiotie et ne reprend pas à son compte la vacuité de ses raisonnements . l'absurdité des justifications Voltaire va ainsi souligner la dignité du baron et de sa famille en soulignant l'absence de causes réelles à cette supériorité. On relève dans ce sens : . [...]
[...] Voltaire établit une relation entre sa physionomie et son caractère : l'esprit le plus simple (ligne sa physionomie annonçant son âme (ligne 3). Il est nommé par une périphrase hautement évocatrice : un jeune garçon à qui la nature avait donné les mœurs les plus douces (ligne 2). Présenté comme un personnage naïf, crédule, incapable de duplicité ni de dissimulation, il croit aveuglément à la philosophie de Pangloss, le précepteur du château. Toutefois, il est témoigné comme ingénu mais pas sot : Il avait le jugement assez droit (ligne 3). [...]
[...] Le lendemain après le dîner, comme on sortait de table, Cunégonde et Candide se 50 trouvèrent derrière un paravent ; Cunégonde laissa tomber son mouchoir, Candide le ramassa, elle lui prit innocemment la main, le jeune homme baisa innocemment la main de la jeune demoiselle avec une vivacité, une sensibilité, une grâce toute particulière ; leurs bouches se rencontrèrent, leurs yeux s'enflammèrent, leurs genoux tremblèrent, leurs mains s'égarèrent. M. le baron de Thunder-ten-tronckh passa auprès du paravent et, voyant cette cause et cet effet, chassa Candide du château à grands coups de pied dans le derrière ; Cunégonde s'évanouit ; elle fut souffletée par Mme la baronne dès qu'elle fut revenue à elle ; et tout fut consterné dans le plus beau et le plus agréable des châteaux possibles. Voltaire, Candide, Chapitre I (Incipit). Icelui : forme archaïque du pronom démonstratif celui-ci. [...]
[...] Le précepteur philosophe fait de son élève un esprit naïf et crédule. Voltaire condamne ainsi le dogmatisme, c'est-à-dire le fanatisme philosophique - et surtout en jouant malicieusement avec la cause et la conséquence : Voltaire fait la satire d'une philosophie qui repose sur des erreurs de raisonnements en s'amusant à souligner que, dans cette société, les relations entre les causes et les conséquences sont absurdes. La cause son château avait une porte et des fenêtres (ligne 10) ne devrait pas entraîner un des plus puissants seigneurs de la Westphalie (ligne 9). [...]
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