Le lecteur est ici à l'articulation capitale du roman : le héros est sans Cunégonde ni Pangloss et va se trouver initié au seul monde qui peut répondre à la théorie optimiste. L'élaboration imaginaire d'un système social et politique idéal va permettre à Voltaire de proposer un modèle de société.
I- Les marques de l'utopie
Monde idéal, Eldorado surprend d'abord par le pittoresque et le merveilleux, par l'opulence, par tant de bienfaits qui conservent pourtant pureté et simplicité aux habitants de ce pays imaginaire.
a- L'opulence et le merveilleux
L'abondance concerne tous les domaines de la vie :
- les habitations
La première habitation rencontrée est bâtie comme un palais d'Europe (lignes 1-2), et encore ce n'est qu'un cabaret (ligne 7)
- les vêtements
Déjà soulignés au début du chapitre avec les enfants du village « couverts de brocarts d'or tout déchirés », ils indiquent la richesse des habitants qui sont vêtus de draps d'or (ligne 8)
- l'abondance
Les repas sont d'une extrême abondance, amplifiés par une accumulation de plats exotiques et le champ lexical du nombre (quatre, ligne 10 ; deux cents, ligne 11 ; trois cents, ligne 11 ; six cents, ligne 12). D'autant plus que pour les lecteurs de l'époque, l'exotisme était synonyme de luxe.
- les objets
Même les récipients indiquent cette richesse, étant faits d'une espèce de cristal de roche (ligne 13).
Les larges pièces d'or (ligne 19) que Cacambo a ramassées et avec lesquelles il souhaite payer les repas sont les cailloux de nos grands chemins (ligne 23) pour les habitants. On peut y voir une allusion aux conquistadors, aventuriers espagnols qui firent la conquête du Nouveau Monde au XVIe siècle et recherchaient l'or. (...)
[...] Enfin ils se remirent : Messieurs, dit l'hôte, nous voyons bien que vous êtes des étrangers ; nous ne sommes pas accoutumés à en voir. Pardonnez-nous si nous nous sommes mis à rire quand vous nous avez offert en paiement les cailloux de nos grands chemins. Vous n'avez pas sans doute de la monnaie du pays, mais il n'est pas nécessaire d'en avoir pour dîner ici Toutes les hôtelleries établies pour la commodité du commerce sont payées par le gouvernement. Vous avez fait mauvaise chère ici, parce que c'est un pauvre village ; mais partout ailleurs vous serez reçus comme vous méritez de l'être. [...]
[...] Ils arrivent par hasard dans un pays étrange où l'on fait peu de cas de l'or et des pierres précieuses et où tout semble idéal, l'Eldorado (pays doré). Alors que le début de ce chapitre raconte les difficultés d'accès à ce pays, la fin rapporte la découverte qu'en font Candide et Cacambo. Voltaire force l'aspect merveilleux du lieu qui annonce l'utopie. Le lecteur est ici à l'articulation capitale du roman : le héros est sans Cunégonde ni Pangloss et va se trouver initié au seul monde qui peut répondre à la théorie optimiste. [...]
[...] C'est probablement le pays où tout va bien ; car il faut absolument qu'il y en ait de cette espèce. Et quoi qu'en dît maître Pangloss, je me suis souvent aperçu que tout allait mal en Westphalie. Voltaire, Candide, Chapitre XVII (fin). Contour : mot péruvien ; nous disons condor Circonspecte : prudente, réservée. Cacambo rend, c'est-à-dire traduit, interprète et restitue ; peut- être sa mimique exprime-t-elle en même temps de l'admiration et de la surprise. ÉTUDE ANALYTIQUE Introduction Né en 1694, François Marie Arouet, dit Voltaire, est un des grands hommes du mouvement des Lumières. [...]
[...] À la place, ils les informent des coutumes locales. - enfin, les habitants sont généreux et humbles. Après leur avoir offert un repas très copieux, ils s'excusent de la piètre qualité des mets, arguant de la pauvreté du village (Vous avez fait mauvaise chère ici, parce que c'est un pauvre village ; mais partout ailleurs vous serez reçus comme vous méritez de l'être, lignes 26-27). Tout dans cette description contribue à décrire un monde idéal : la richesse, le bonheur des gens, la vie harmonieuse. [...]
[...] T E X T E Chapitre XVII Arrivée de Candide et de son valet au pays d'Eldorado, et ce qu'ils y virent. Ils approchèrent enfin de la première maison du village ; elle était bâtie comme un palais d'Europe. Une foule de monde s'empressait à la porte, et encore plus dans le logis. Une musique très agréable se faisait entendre, et une odeur délicieuse de cuisine se faisait sentir. Cacambo s'approcha de la porte, et entendit qu'on parlait péruvien ; 5 c'était sa langue maternelle : car tout le monde sait que Cacambo était né au Tucuman, dans un village où l'on ne connaissait que cette langue. [...]
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