Verlaine n'est âgé que de 22 ans lorsqu'il publie en 1866 les Poèmes saturniens. Le titre du recueil semble particulièrement représentatif des maux de son jeune âge. En effet, Saturne, du nom de Cronos en grec, symbolisait le temps ; thème que le poète prend pour édifice dans la plupart des poèmes de ce recueil.
Dépressif et en quête d'absolu, Verlaine évoque grandement la tristesse à travers une nostalgie nuancée. Ainsi, par des « paysages tristes », il représente avec de grandes analogies les tableaux d'une école picturale de la seconde moitié du XIXème siècle : l'impressionnisme, comptant parmi ses précurseurs Monet, Renoir, Sisley et bien d'autres. L'écriture qui le caractérise est novatrice pour l'époque, dépasse le conformisme précédent et ouvre sur l'évocation des sentiments et des maux de son auteur (...)
[...] Puis, jusqu'à la fin du poème, ces quelques sons laissent place au silence donnant un aspect de calme. Petit à petit, le soleil couchant montre que la lumière décline pour ne faire apparaître que des ténèbres qui vont effacer ces maigres rayons qui existent encore suprêmes Une confusion entre le ciel et la terre (ici symbolisée par l'eau) est évoquée lorsque les ténèbres viennent noyer les suprêmes Les mouvements disparaissent au fur et à mesure que l'on avance dans le poème. [...]
[...] Les saules la saulaie rappèlent rapidement les saules pleureurs image supplémentaire vers la tristesse. La vie est peu représentée car seules les sarcelles animent ce décor. Cependant, elles ont un rôle important. Elles évoquent la nostalgie car elles se rappelaient et la personnification est encore plus marquée par le fantôme pleurant comme la voix des sarcelles L'indécision de l'adolescent que Verlaine était se présente sous la forme d'une atmosphère floue avec la brume vague donnant un aspect de rondeur à ce tableau digne des tableaux impressionnistes. [...]
[...] Ce poème est une véritable nouveauté car Verlaine réussit à transfigurer ces sentiments dans l'aspect d'un paysage. Son intérieur est semblable à un tableau impressionniste : plein de profondeur et de vérité. Ses sentiments vont colorer ce tableau et ce décor va faire paraître la mélancolie et la nostalgie de son auteur. Verlaine a donc ici peint un regard sur lui-même : c'est le reflet à la surface de l'eau, une juxtaposition d'une vision extérieure et intérieure, une promenade des sentiments. [...]
[...] Verlaine va ainsi projeter ses sentiments sur chaque élément qui compose ce cadre : son intérieur va colorer ce paysage. Cependant, des sentiments sont évoqués de manière indirecte. On commence par l'abandon lorsque Verlaine a besoin d'être bercé bercer Le paysage témoignant d'une beauté simple rappelle les songes et la mélancolie. La souffrance est longue, diffuse presque lancinante. En effet, la froideur des nénuphars blêmes l'utilisation de décasyllabes et la répétition de sonorités identiques vont faire vibrer cette douleur. L'élément principal en est l'allitération avec dardait ses rayons suprêmes. [...]
[...] Cette inquiétude est renforcée par les verbes pleurer et noyer et qui se conforte par le lexique de la mort : fantôme ténèbres couchant blêmes Les couleurs s'assombrissent vers la fin avec les nénuphars blêmes qui par leur grandeur vont jeter une ombre inquiétante sur ces calmes eaux La réitération des mêmes images, des mêmes mots va plus loin que l'évocation d'une souffrance lancinante mais elle crée l'angoisse. Verlaine est un homme troublé comme le témoigne le fantôme qui l'habite. Le poème commence par la clairvoyance de l'auteur sur lui-même pour finir comme emprisonné dans ces états d'âme comme un filet se refermant sur sa proie. [...]
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