Né en Grèce au VIIème siècle avant Jésus-Christ, le théâtre antique, joué à l'occasion des fêtes religieuses, avait pour mission d'exalter les vertus humaines et de purifier les passions et permettait aux citoyens athéniens de réfléchir aux fondements de la jeune démocratie. Depuis l'Antiquité jusqu'à nos jours, le théâtre a beaucoup évolué. Il s'est affranchi des règles classiques et a souvent été l'occasion pour les dramaturges de critiquer la société et de défendre leurs idées (...)
[...] Cependant, l'on ne peut pour autant le réduire à ce rôle social. Le théâtre est aussi un lieu de l'illusion, du jeu, du paraître et des faux-semblants, qui vise à plaire. Le théâtre, dans sa dimension artistique, peut très bien être gratuit. N'est-il pas avant tout un spectacle ? Les décors, les costumes, la musique, la poésie exercée par le langage en font un véritable divertissement. Dans Dom Juan qu'il écrit vers 1665, Molière cherche avant tout à éblouir le public et à le faire rêver par la variété et l'abondance des décors en parfaite harmonie avec la somptuosité des costumes. [...]
[...] Jouant sur tous les registres, il mène le spectateur du rire aux larmes. C'est d'ailleurs cette dimension émotionnelle qui est évoquée dans les Diablogues de Dubillard : C'était tellement beau ! Mais le rêve et le jeu ne sont là que pour mieux nous renvoyer au réel, le paraître à l'être. Le théâtre est en fait un miroir stylisé du réel, qui vise à instruire. C'est justement parce qu'il est divertissant qu'il constitue un lieu idéal de défense et de diffusion des idées. [...]
[...] L'illusion théâtrale que nous évoquions plus haut, en transportant le spectateur dans un monde virtuel occupé par des symboles, lui impose un voyage mental divertissant, certes, mais aussi propice à la prise de distance critique : le spectateur avisé sait faire le lien entre la société espagnole décrite par Beaumarchais dans Le Barbier de Séville ou Le Mariage de Figaro et la société que l'auteur critique en réalité. De même, il sait reconnaître dans l'île ou Marivaux transporte des esclaves athéniens de l'Antiquité une mage de l'Europe du XVIIIème siècle. La transposition est alors propice à la réflexion. Le plaisir lié à la représentation comporte un caractère vivement attractif. [...]
[...] Le théâtre devient donc, très souvent, une caisse de résonance des débats qui animent une société. La meilleure preuve de l'importance du théâtre dans le débat d'idées est l'attention que lui a très souvent portée la censure. Si le pouvoir politique s'est si souvent opposé aux auteurs dramatiques, c'est bien parce qu'il craignait les répercussions de leurs œuvres. Ainsi, la représentation de Tartuffe, pièce dans laquelle Molière dénonce le pouvoir de la Compagnie du Saint-Sacrement, fut interdite en 1664. De même, d'autres dramaturges comme Jean Genet furent censurés. [...]
[...] Plaisir et réflexion se combinent au lieu de s'exclure. En effet, ces fonctions ne sont pas incompatibles et s'associent même pour former toute la richesse culturelle du théâtre. Voilà pourquoi, sans doute, de nombreux textes littéraires, notamment Candide de Voltaire mais aussi l'oeuvre de Proust, font l'objet d'adaptations théâtrales. En renvoyant une image de l'homme et du monde, le théâtre permet ainsi de dénoncer pour corriger, de défendre et de diffuser des idées, ou au moins de faire en sorte que le spectateur s'interroge. [...]
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