A une époque ou la résistance commence à peine à se développer et contrer l'occupation allemande et la corruption, Vercors, un écrivain et auteur de nouvelles, mais avant tout résistant, écrit Le Silence de la mer en 1942. L'extrait étudié tiré de cette oeuvre engagée relate une scène où un narrateur et sa nièce, contraint de loger chez eux un officier allemand, vont exprimer leur opposition par un profond et pesant silence. Un bel exemple d'une résistance véritable, et néanmoins sans violence.
Mais comment Vercors, dans cet extrait pourtant simple bien que très symbolique, parvient-il à transmettre cette atmosphère écrasante, tendue voire dramatique ?
[...] C'est pourquoi au cours de la lecture, le lecteur perçoit le silence comme une personne qui s'impose. La phrase : «Epais et immobile», réduite à deux adjectifs, traduit la retenu du narrateur, comme s'il voulut ne pas faire trop éclater le silence. Toutefois, il y a des entorses à ce silence. En effet, le bruit de pas sourds, durs et tristes de l'allemand entendu par le narrateur lorsqu'il montait les escaliers, ou encore le bruit de porte anonyme, neutre. Tout cela semblerait être la symbolique d'une impossibilité définitive de communication. [...]
[...] Tout d'abord, une description particulière de l'officier allemand contribue en partie à cette atmosphère de grande tension dramatique. En effet, l'extrait comporte bien cinq lignes environ de description qui lui est entièrement dédiée. Cet officier, vue au travers du narrateur est perçu comme imposant, impressionnant, respectable : «immense» «impressionnantes «beau». Mais si son effigie paraît méliorative, il reste toutefois cet aspect «imposant» du personnage qui souligne sa nationalité allemande dans un contexte critique : l'occupation allemande. D'autre part, les phrases brèves, c'est-à-dire la syntaxe courte, suggèrent une certaine dureté de cet homme. [...]
[...] Le rythme est insoutenable, le silence bien trop étouffant. L'impossibilité de communication est aussi représenté par un dialogue qui dis fonctionne : sur trois répliques, deux sont de l'officier, courtoises et pleines de politesse, malgré quelques fautes de français, et l'une du narrateur, mais seulement lorsque ce dernier sera parti. En d'autre terme, c'est un faux dialogue. En conclusion, de par la description mitigée de l'officier allemand, ennemi de ceux qui se doivent de l'accueillir, puis celle du silence, particulièrement écrasante et dramatique, ou encore l'aspect figée de la scène et de ses personnages, Vercors nous emmène dans un monde empli de symboliques, d'émotions et de réflexions. [...]
[...] En effet, cette scène est particulièrement statique. Contribue à cette inertie : la mise en scène des personnages tout au long de l'extrait, qui est très significative. La position verticale du personnage allemand, en contraste avec celles assises de la nièce ainsi que du narrateur montre le fossé entre les deux clans, les deux pays, les deux puissances. L'attitude d'obstination de la nièce : «toujours raide et droite», témoignant de son courage, mais aussi d'une certaine gêne. Son indifférence forcée à l'égard de l'officier lorsqu'elle se trouve obligée de lu montrer le chemin de sa chambre : «sans un regard pour l'officier». [...]
[...] Ce qui accentue la dimension écrasante de la scène. Une atmosphère opaque voire presque surnaturelle est plantée grâce aux nombreuses figures de rhétoriques peignant ce silence. Des figures de style telle que la comparaison : «Comme le brouillard du matin», avec un élément presque fantastique, amplifie l'inquiétant de la situation. Ou encore la métaphore, ici bien classique du silence plomb», participe également à ce rôle. Se trouve aussi la répétition des adjectifs «épais» et «immobiles» plusieurs fois en seulement quelques lignes, qui qualifient ce fameux silence. [...]
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