Cette dissertation pèse la part de tradition et de modernité dans « Siegfried et le limousin » de Giraudoux et « Le bal du comte d'Orgel » de Radiguet à travers un plan composé de deux parties approfondies.
[...] et ceci ne correspond guère avec la gravité secrète du propos de Giraudoux. Par opposition, ce que certains pensent être un aspect novateur du roman de 1918 à 1927 (son aspect touffu, érigé sans plan précis): Sigfried et le Limousin, Les faux-monnayeurs . n'est qu'un faux semblant; le roman étant ordonné comme un château rococo, ceci dissimulé sous cette apparence de désordre que donne l'accumulation de détails. Et, en ce point encore, Siegfried et le Limousin correspond à une certain tradition. Mais il en de même dans l'écriture des deux romans. [...]
[...] Ainsi, dans Siegfried et le Limousin, Siegfried ne redevient pas forestier, il redevient forestier en ayant conscience d'avoir été Siegfried. Ces deux romans, sujets de notre étude, d'apparentes structures circulaires -comme les romans de 1908 à 1914 ou ceux de 1880 où la fin et le commencement se rejoignent - évoluent : Mahaut voit, à la fin du roman, en Anne, non plus le mari mais l'hypnotiseur, le père; et Forestier français et Siegfried allemand forment une symbiose unissant les deux nationalités en un seul être. [...]
[...] Radiguet maîtrise l'art de la litote mais, tout comme pour Giraudoux, il y a dans son écriture un aspect ludique car le pastiche en lui-même n'est-il pas un jeu? Même si Malraux affirme que «toute destinée d'artiste commence par le pastiche» , l'originalité et la novation de Radiguet n'est-il pas de pasticher l'écriture de Mme de La Fayette tout en y imprimant son empreinte personnelle? Et ceci, les premières phrases du roman nous un exemple flagrant: tel mélange du devoir et de la mollesse semblera peut-être, de nos jours, incroyable, même chez une personne de race et une créole». [...]
[...] Cette articulation entre tradition et modernité se situe dans une écriture au deuxième degré à la fois référence aux formes traditionnelles et prise de distance à leur égard. Pourtant, on ne peut consigner ces deux romans à la simple symbiose de tradition et novation, ordre et aventure sont tout autant présents dans ces deux romans: l'ordre des conventions ou l'aventure d'une société sur son déclin dans Le bal du comte d'Orgel ; et l'ordre forgé dans l'esprit de Siegfried Von Kleist et l'aventure du narrateur à la recherche de Forestier dans Siegfried. [...]
[...] De même, le thème de l'identité inconnue ou perdue dans Siegfried et le Limousin n'est pas sans faire écho dans nos mémoires à Siegfried ou encore Parsifal. Se rapprochant de leur époque, dans le temps, nous pourrions même faire un parallèle, de manière plus lointaine, entre Le bal du comte d'Orgel et le roman de 1880 qui avait une certaine ambition démonstrative et s'intéressait aux soucis conjugaux: le divorce, l'adultère . ou encore entre Sigfried et le limousin et les romans plus ambitieux, plus sérieux de la période comprise entre 1880 et 1890; ou encore, l'assimiler à un roman à thèse comme ceux de fin 1890 et dont la thèse serait: l'évolution des sociétés n'est qu'un va et vient entre la “civilization” et la (pour reprendre les termes allemands employés par Thomas Mann), c'est à dire, selon Jean Giraudoux, une conception de la vie proche des choses, d'une construction interne de l'univers et d'un accord avec ce même univers, le regard humain ayant figé les choses et ainsi les transformer en objets. [...]
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