Les commentaires des Salons de Diderot étaient destinés à des lecteurs qui ne pouvaient pas voir les oeuvres concernées. Ainsi, le travail de critique de Diderot dans Ruines et Paysages, III, Salon de 1767 se devait de retranscrire avec fidélité les tableaux exposés. C'est ainsi que, comme l'affirme Jacques Chouillet dans L'Esthétique des Lumières, le salonnier est « condamné à n'être qu'un traducteur ». Il s'agit pour lui de donner les oeuvres absentes à voir. Le problème est d'ordre linguistique : il faut rendre compte, par un langage verbal, d'oeuvres artistiques (...)
[...] Le meilleur compte-rendu d'un tableau pourra être un sonnet ou une élégie dit Baudelaire dans Salon de 1846 On passe d'un discours sur l'art à un discours d'art. Ainsi, le texte devient autonome. Pour faire fonctionner l'imagination des lecteurs, il rend compte de ses propres émotions face aux toiles. Il rend ainsi compte de l'effet produit par ces dernières. Cela donne lieu, dans le cadre des œuvres de Vernet, par exemple, à un épanchement lyrique paroxystique ; ainsi s'exclame t il, après avoir décrit le paysage de sa promenade romanesque : O Nature, que tu es grande ! [...]
[...] Ainsi, le travail de critique de Diderot dans Ruines et Paysages, III, Salon de 1767 se devait de retranscrire avec fidélité les tableaux exposés. C'est ainsi que, comme l'affirme Jacques Chouillet dans l'Esthétique des Lumières, le salonnier est condamné à n'être qu'un traducteur Il s'agit pour lui de donner les œuvres absentes à voir. Le problème est d'ordre linguistique : il faut rendre compte, par un langage verbal, d'œuvres artistiques. Cela est a priori une tâche très difficile, puisque le commentateur des Salons [doit] essa[yer] comme il le [peut] de combler l'écart qui le sépare de la peinture visible En effet ces œuvres d'art appartiennent à un autre univers sémiotique. [...]
[...] Cela va de pair avec une réflexion sur l'Idée : bien peindre c'est avant tout avoir trouver la grande idée capable de guider la composition. Ainsi le plus grand défaut d'un tableau est d'être morne et sans vie Les œuvres de Vernet se détachent ainsi par leur réalisme et l'illusion qu'elles provoquent. La véritable peinture doit alors produire un effet : volupté, terreur ou pathétique. L'expressivité d'une composition est de première importance. Sa théorie de l'art prend en outre forme par le dialogue : il converse ainsi avec son destinataire, mais s'adresse aussi aux peintres Mr. [...]
[...] On n'en sait rien Cependant, l'auteur de Ruines et Paysages se rend compte de la difficulté de la tâche à accomplir. Il revient souvent sur les lacunes du langage à exprimer ce qu'il voit : la langue ne me fournit pas ( ) l'expression de la vérité. J'abandonne une thèse, faute de mots ( ) J'ai au fond de mon cœur une chose, et j'en dis une autre Même la description la plus détaillée est inefficace : Plus on détaille, plus l'image qu'on présente à l'esprit des autres diffère de celle qui est sur la toile La traduction, le passage de l'image à l'écrit transforme obligatoirement l'expérience de confrontation avec une œuvre d'art. [...]
[...] Ainsi, comme l'exprime Béatrice Didier dans l'article L'Esthétique des Lumières de l'Histoire de la littérature française au XVIIIe siècle, Diderot crée véritablement un style de la critique d'art, dans la mesure où, conscient de la difficulté qu'il y a à rendre par des mots une œuvre picturale ( ) qui appartient à un autre univers sémiotique, il crée un langage neuf Le salonnier est lui même un créateur qui, en formant une poétique et une langue de l'art, prolonge l'œuvre picturale, et fait du texte un objet autonome. Et le texte du Salon de 1767 forme en effet un texte autonome. Le travail du salonnier ne s'arrête pas à transposer l'œuvre par écrit. Il prend aussi ses distances avec cette dernière : c'est aussi un critique qui affirme ses goûts, exprime ses théories et prend plaisir à écrire, indépendamment de l'opération de traduction qu'il doit accomplir. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture