Stendhal choisit de peaufiner l'écrin de sa future histoire, de différer l'arrivée de son futur héros, Julien Sorel, dont on croise pourtant le père, paysan roublard propriétaire d'une petite scierie. La ville (imaginaire) de Verrières est présentée comme un personnage collectif, multiforme, dont il s'agit de faire le portrait en évoquant quelques personnalités marquantes : Monsieur de Rênal, le père Sorel en particulier (...)
[...] Cette grâce lui vint après les élections de Il a donné à Sorel quatre arpents pour un, à cinq cents pas plus bas sur les bords du Doubs. Et, quoique cette position fût beaucoup plus avantageuse pour son commerce de planches de sapin, le père Sorel, comme on l'appelle depuis qu'il est riche, a eu le secret d'obtenir de l'impatience et de la manie de propriétaire, qui animait son voisin, une somme de 6000 francs. Il est vrai que cet arrangement a été critiqué par les bonnes têtes de l'endroit. [...]
[...] Il prit à l'étagère de verre, le vaporisateur et pulvérisa l'huile fluide et odorante sur ses cheveux clairs. Son peigne d'ambre divisa la masse soyeuse en longs filets orange pareils aux sillons que le gai laboureur trace à l'aide d'une fourchette dans de la confiture d'abricots. Colin reposa le peigne et, s'armant du coupe-ongles, tailla en biseau les coins de ses paupières mates, pour donner du mystère à son regard. Il devait recommencer souvent, car elles repoussaient vite. Il alluma la petite lampe du miroir grossissant et s'en rapprocha pour vérifier l'état de son épiderme. [...]
[...] Par exemple, cette scie à bois, dont la position singulière sur la rive du Doubs vous a frappé en entrant à Verrières, et où vous avez remarqué le nom de SOREL, écrit en caractères gigantesques sur une planche qui domine le toit, elle occupait, il y a six ans, l'espace sur lequel on élève en ce moment le mur de la quatrième terrasse des jardins de M. de Rênal. Malgré sa fierté, M. le maire a dû faire bien des démarches auprès du vieux Sorel, paysan dur et entêté; il a dû lui compter de beaux louis d'or pour obtenir qu'il transportât son usine ailleurs. Quant au ruisseau public qui faisait aller la scie, M. [...]
[...] “Allons, laissez-moi rentrer, dit Claude, ce n'est pas tenable.” Tous deux se trempaient. À la clarté vague du bec de gaz scellé au coin de la rue de la Femme-sans-Tête, il la voyait ruisseler, la robe collée à la peau, dans le déluge qui battait la porte. Une pitié l'envahit: il avait bien, un soir d'orage, ramassé un chien sur un trottoir!. Mais cela le fâchait de s'attendrir, jamais il n'introduisait de fille chez lui, il les traitait toutes en garçon qui les ignorait, d'une timidité souffrante qu'il cachait sous une fanfaronnade de brutalité; et celle-ci, vraiment, le jugeait trop bête, de le raccrocher de la sorte, avec son aventure de vaudeville. [...]
[...] On avait ajouté, pour les enfants, un lit de fer qui barrait la commode et emplissait les deux tiers de la pièce. La malle de Gervaise et de Lantier, grande ouverte dans un coin, montrait ses flancs vides, un vieux chapeau d'homme tout au fond, enfoui sous des chemises et des chaussettes sales ; tandis que, le long des murs, sur le dossier des meubles, pendaient un châle troué, un pantalon mangé par la boue, les dernières nippes dont les marchands d'habits ne voulaient pas. [...]
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