Fiche de lecture sur l'ouvrage d'Yves Sintomer, le Pouvoir au peuple, paru aux Editions La Découverte en 2007. L'auteur propose une réflexion sur la réintroduction du tirage au sort en politique, en s'appuyant sur l'histoire de son utilisation.
Pour Yves Sintomer, sociologue de Paris VIII, chercheur au CNRS et directeur adjoint du centre Marc Bloch de Berlin, ces accusations relèvent d'une « crainte des masses » (Balibar), d'une « haine de la démocratie » (Rancière), et d'une évidente inculture politique. Notant un écart et d'une défiance réciproque grandissants entre les dirigeants et les dirigés (exemple du référendum en France sur la constitution européenne : 92% des représentants du Congrès votent « Oui », 55% des électeurs « Non »), il formule un constat d'une crise de la politique, articulé en six propositions (la politique impuissante, le décrochage politique des classes populaires, l'émergence d'une société du risque, la crise de l'action publique bureaucratique, l'obstacle de l'idéologie républicaine). Il récuse la thèse d'un désintérêt de la population et d'un individualisme politique, pour souligner que des dynamiques civiques existent, mais que le système politique ne parvient (ne veut ?) pas les intégrer. Enfin, il suggère qu'il y a une troisième voie entre la démocratie partisane et la démocratie médiatique (qui reposent toutes deux sur des mécanismes de domination wébériens): la démocratie participative.
I. Le tirage au sort comme donnée quasi permanente de l'histoire de nos sociétés
A. Evolution des fonctions du tirage au sort
B. La raison d'une discréditation
II. La pertinence du tirage au sort à travers les expériences contemporaines
A. Vers une meilleure représentation
B. Jury citoyens, conférences de consensus et sondages délibératifs
III. Innover : les conclusions et propositions de l'auteur
A. Une opinion éclairée
B. De l'usage du tirage au sort pour un « autre monde ».
[...] Le tirage au sort comme donnée quasi permanente de l'histoire de nos sociétés A. Evolution des fonctions du tirage au sort Athènes est la première référence à évoquer en matière de tirage au sort. Mettant en place un système relativement complexe, qui demandait la participation de 2000 citoyens sur quelques 200 jours annuels, la cité se reposait sur le tirage au sort pour garantir une égale participation de tous au gouvernement, la rotation des charges, une obligation de rendre des comptes. [...]
[...] L'initiative populaire serait aussi instaurée. Il est également possible d'envisager d'utiliser le tirage au sort pour constituer des observatoires pour tous les services publics, mais aussi des jurys citoyens qui évalueraient les responsables politiques deux fois dans leur mandat. Un droit de révocation des élus pourrait être effectif si 20% des électeurs se prononcent favorablement à cet effet. Un Tribunal populaire pourrait être mis en place, pour juger des délits de presse, des affaires politiques, de corruption impliquant des hauts responsables de l'Etat, atteinte à la sûreté des lois. [...]
[...] La démocratie participative, en ce qu'elle associe les citoyens au processus de jugement et de décision, rejoint le mot de Tocqueville (De la démocratie en Amérique, I ch. VIII): Le jury, qui est le moyen le plus énergique de faire régner le peuple, est aussi le moyen le plus efficace de lui apprendre à régner. Bibliographie : SINTOMER Yves, Le pouvoir au peuple. [...]
[...] Il propose donc de réfléchir à la réintroduction du tirage au sort en politique comme solution à cette crise de légitimité démocratique. Sa démonstration, riche en exemples, repose également les questions fondamentales dans tout ordre démocratique : celles de la légitimité politique, de la souveraineté populaire, du sens de la représentation, et de la construction collective de l'intérêt général. Son propos se construit sur l'histoire générale de l'utilisation du tirage au sort en politique d'Athènes à nos jours, soulignant les expérimentations se déroulant dans les démocraties contemporaines pour aboutir à des propositions qui s'adressent en particulier au cas français (III). [...]
[...] Leur bon sens doit leur servir à juger impartialement des cas criminels. Les jurys d'assise se développent particulièrement aux Etats Unis (aujourd'hui, malgré un certain déclin, ils se chiffrent à au niveau des Etats et au niveau fédéral, quand en France ils avoisinent les 2000), et sont intégrés dans les 6ème et 7ème amendements de la Constitution de 1789. En France, sous la Constituante, le principe de jurés tirés au sort est acquis, mais ses modalités sont déterminées par un consensus entre la droite, qui aurait préféré un critère censitaire pour tirer au sort les participants, tandis que Robespierre voudrait étendre le tirage au sort à tous les citoyens males. [...]
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