Politique de la littérature, Jacques Rancière, La mise à mort d'Emma Bovary, puissance des mots, pureté de l'âme
Terme logique d'une suite de désilusions qui découle d'une illusion originelle : elle a confondu la littérature et la vie réelle. Raisons fictionnelles du suicide et la nécessité fictionnelle > raisons sociales. Ce n'est pas son aspect de leçon social qui a retenu Flaubert, les pb sociaux ne l'ont jms intéressé et les leçons morale pas davantage.
[...] Ce procès-là est plus complexe car non seulement c'est l'inventeur d'un personnage qui y joue le double rôle du juge et du bourreau mais aussi ce juge et boureau, est, dans une large mesure, le complice de la condamnée. Elle veut identifier la littérature à a vie, et, pour cela, elle rend toute source d'excitat° équivalente à toute autre. La pureté de l'âme est de ne rien avoir à rendre à ses sujets. Elle consiste en ceci même que rien ne sépare ce qui appartient à l'art de ce qui appartient à la vie prosaïque. [...]
[...] Emma ne prend pas la littérature pour la vie mais elle exige positivement une vie et une littérature qui puissent se fondre en une seule réalité. Ce qui définit son personnage, c'est son refus de séparer deux sortes de plaisir/jouissance : la jouissance matérielle des biens et des plaisirs matériels et la jouissance spirituelle de la littérature et de l'art. Flaubert la caractérise de sentimentale, d'esprit positif. Elle veut y trouver plus qu'un objet de contemplation intellectuelle : une source d'excitat° pratiQ. [...]
[...] Le crime d'Emma est un crime contre la littérature Z C'est de cette guerre de l'art contre l'esthétisme que F. est le précurseur. Montrer la bonne manière de réaliser ce qu'ils ont contrefait, l'indistinct° de l'art et de la vie. Le style voulait [ ] dire l'art des belles phrases qui vient de relever la description de situations et de personnages vulgaires. [ ] Il ajusterait des phrases élégantes à des histoires triviales. Emma prend un art pour un autre : est restée à la vieille poétique des actions, avec ses personnages poursuivant de grands desseins, sentiments suscités par les qualités des personnes et ses passions nobles opposées aux sentiments du commun (épopée.) Tâche nouvelle de l'art qui est une nouvelle forme de l'art, nouvelle façon d'écrire. [...]
[...] Sinon il ne serait plus un personnage de fict° mais un créateur de littérature la littérature est seule la vraie vie, la vie vraiment vécue et devenue claire pour elle-même La puissance des mots : les mots sont ces êtres sans corps qui ont le pvr d'arracher les existences à leur destination naturelle. Quest° de la littérature : quest° de santé. La force du style qui tient le livre est pour F la capacité de manifester une vibrat°, une puissance de désindividualisat° qui ramène toute l'histoire à la danse des atomes qui s'entrelacent. Le mot doit se faire oublier pour miner de l'intérieur la marche de l'intrigue et les interprétations qui veulent donner du sens. Le style absolu est celui qui ne sélectionne pas. Jacques Rancière, politique de la littérature. [...]
[...] En s'attribuant la possibilité de donner à toute chose vulgaire le caractère de l'art, il ne peut ignorer le revers de la médaille : ce qui vaut pour lui vaut tout autant pour Emma. > littérarise le crime symbolique. F. est étranger aux préoccupations des mœurs, son seul soucis concerne l'art. Il concerne le nœud qui lie l'égalité artistique à ce nouveau partage du sensible qui rend les plaisirs de l'esprit disponibles pour n'importe qui. Erreur d'Emma : sa faute contre l'art, l'esthétisation de la vie quotidienne. [...]
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