La mélancolie, l'épanchement des sentiments, l'amour pleuré au passé sont autant de topoï prisés en ce début du XIXe siècle. Le culte de la sensibilité et du grand coeur est empreint d'une image toute féminine, et permet, ainsi, aux poétesses de s'exprimer plus librement. Marceline Desbordes-Valmore fait partie de ces femmes qui marqueront le siècle (...)
[...] Les poétesses présentées sont Mme Tastu et Mme Emile de Girardin née Gay. Même si Mme Tastu semble avoir emporté l'admiration du critique bien davantage que Mme Valmore et Mme de Girardin, à la lecture de ces textes, plusieurs aspects déjà notés précédemment ressurgissent. L'article sur Mme Emile de Girardin est particulièrement intéressant car il pose le problème de la vision des femmes au XIX° siècle de manière explicite. Antoine de Latour, dès le troisième paragraphe, s'exprime en ces termes : Non, il n'y a point dans le caractère national assez d'enthousiasme et de naïveté, pour qu'une femme puisse, sans péril, se placer au-dessus et en dehors de la foule, s'emparer de nos sympathies pour les chanter ou pour les combattre. [...]
[...] Néanmoins, Marceline Desbordes-Valmore est comparée à d'autres poètes à de nombreuses reprises. Antoine de Latour, notamment, s'y emploie abondamment. Des rapprochements sont établis avec Chateaubriand, Mme Dufrénoy, Mme Tastu, Chénier et La Fontaine. Toutefois, elles n'instaurent pas un lien d'égalité. La comparaison n'est jamais le lieu d'une glorification, l'aspect positif est toujours contrarié. Ainsi, évoquant les premières publications de la poétesse, il écrit : Au début, son style se distingue déjà, par plus de mouvement et de gracieux abandons, du style de Mme Dufrénoy, dont il a parfois l'élégance, sans en avoir toujours la correction, et de celui de Mme Tastu, éloquente élève de Mme Dufrénoy, dont il n'a pas le tour ferme et précis. [...]
[...] Mais en 1833 il semble que Desbordes- Valmore n'en demandait pas davantage. Elle était contente de son succès, des portes qui s'ouvraient devant elle, de l'accueil qu'on lui faisait dans les revues littéraires, de l'argent qu'elle gagnait ainsi. Elle n'a sûrement pas eu l'intention d'égaler les grands poètes de son temps. D'où ,par exemple, la modestie et la prudence de sa réponse à Lamartine : Car je ne suis qu'une faible femme ; / Je n'ai su qu'aimer et souffrir ; / Ma pauvre lyre c'est mon âme( ) Dans le volume suivant, Pauvres fleurs, elle avoue n'être qu'un frêle oiseau de la poésie. [...]
[...] Mais, il s'agit surtout d'exposer son talent poétique comme le fait, par exemple, Hugo en soulignant le don poétique de Valmore: Il me semble que Madame Desbordes- Valmore n'a encore obtenu que la moitié du triomphe réservé à un talent tel que le sien. Sainte-Beuve, quant à lui, s'exclame : Cette poésie si passionnée, si tendre, et véritablement unique en notre temps puis à propos des Poésies de 1820 : Eh bien ! Voilà un génie charmant, léger, plaintif, rêveur, désolé, le génie de l'élégie et de la romance qui se fait entendre sur ces tons pour la première fois. [...]
[...] Soumise à de nombreux regards critiques, l'œuvre de Marceline Desbordes-Valmore recueille des louanges assez équivoques. Sainte-Beuve, Hugo et Antoine de Latour expriment leur enthousiasme par des tours empreint d'une certaine poésie. Pourtant, un ton bien moins élogieux apparaît par le détour de modalisateurs, ou de comparaisons ambiguës. Bien que précurseur du Romantisme, au même titre notamment qu'Hugo et Lamartine, la poétesse n'est pas reconnue comme tel. Ses engagements du côté des opprimés ne sont point relevés tout comme ses innovations poétiques. [...]
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