Les Poèmes Saturniens sont le premier recueil publié par Verlaine en 1866. Baudelaire, sur qui Verlaine a publié une étude, entame sa misérable dernière année. Avec la fin du poète des Fleurs du Mal, qui a à la fois mené le Romantisme jusqu'à son impasse et vénéré le parnassien Gautier, la poésie se trouve à une croisée de chemins. Le recueil de Verlaine, se réclamant ouvertement de l'illustre prédécesseur, ouvre néanmoins une voie nouvelle. Son poème liminaire, plaçant d'emblée les poètes sous le signe néfaste de la planète Saturne, astre de la mélancolie et de la création, est la première pierre apportée au mythe à venir des "poètes maudits", titre d'un ouvrage que Verlaine fait paraître en 1888. Ces vingt alexandrins aux rimes suivies, composés pour éclairer le titre choisi de Poèmes saturniens, orientent aussi la lecture du recueil (...)
[...] Ces vingt alexandrins aux rimes suivies, composés pour éclairer le titre choisi de Poèmes saturniens, orientent aussi la lecture du recueil. Nous étudierons d'abord le thème de la prédestination au malheur des poètes. Nous verrons ensuite que le poème surprend d'emblée par un discours didactique plus proche de la prose, et reconquis finalement par un élan poétique très sombre. Enfin nous analyserons le triple projet que s'assigne Verlaine : donner l'orientation de son recueil, définir la Poésie ainsi que le travail de lecture. [...]
[...] L'exercice de la lecture des poèmes - Le poème insiste sur l'opération de la lecture, sur la tentative de déchiffrement : ce que font les Sages d'autrefois ; ils Crurent ( ) Lire au ciel (v.2-3). Le mystère est évoqué par l'absence de lumière, avec la syllepse de mal éclairci et par l'expression mystère nocturne La parenthèse des vers 5 à 7 réclame le droit à toutes sortes de déchiffrements. L'allusion aux nécromanciens qui essaient de lire l'avenir, aux grimoires et le distique final ligne à ligne concourent à faire lire le poème aussi comme une aventure de lecture, celle de la poésie. [...]
[...] Verlaine a commencé par intégrer la dimension de la prose, y compris ses signes les moins poétiques ; il se démarque ainsi d'une langue poétique traditionnelle, celle-là même que les Romantiques n'ont pas forcément modifiée. Les quatre premiers vers bousculent d'emblée cette langue par les trois accents (vers et le rythme 1/5 du vers 2. Il n'y a pas rupture totale, car on trouve aussi des vers parfaitement classiques et 11 par exemple : symétrie des accents ou structure parallèle) ; mais Verlaine apporte une évolution certaine. [...]
[...] Mais cette boutade peut aussi contenir le regret d'une ancienne conception qui accordait au poète l'immortalité de ses vers (Homère), ou à l'homme l'immortalité de l'âme (Platon, Phédon). Cette ironie de la boutade exprime un désenchantement, qui n'annule pas tout à fait le fond de l'objection. La poésie l'emporte finalement à la fin du poème. - L'Imagination et l'Idéal font penser à Baudelaire, maître incontesté de la modernité poétique. L'imagination est la reine des facultés (Salon de 1859) pour le poète des Fleurs du Mal (1857), dont Spleen et Idéal est une section majeure. [...]
[...] - En se plongeant dans le passé, Verlaine renforce le caractère fatal de la mélancolie saturnienne, en même temps que le choix des astrologues (mais appelés Sages auréole d'un mystère plus inquiétant que ne le ferait la science, l'idée de prédestination. Ainsi, Verlaine pose dès le poème liminaire, en même temps que l'explication du titre qu'il a choisi pour son recueil, l'idée que certains individus, dont les poètes, sont faits par conjoncture astrale pour souffrir. C'est une destinée inscrite dans le ciel, dans leur âme et leur sang. [...]
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