A chaque poète sa façon d'appréhender la poésie, à chaque poète son "expérience poétique". Les traumatismes en tout genre qu'essuie le XXème siècle (ère du consumérisme, guerres, Shoah, industrialisation massive) ne demeurent pas étrangers à la littérature. Depuis Rimbaud déjà, la poésie moderne traverse une crise du langage et les poètes une crise métaphysique. Qu'en est-il du "moi" poétique ? Comment se dire et dire le monde ? A travers leurs écrits, les poètes tentent d'analyser et de faire sentir le rapport que l'Homme entretient avec le monde qui l'entoure, avec le langage, les mots, les choses. Ils essaient également de définir leur rôle, le statut même de poètes (...)
[...] A en croire le premier titre choisi par Ponge pour son recueil, Sapates, le poète exhorte son lecteur à voir plus loin que l'apparente banalité des choses mais aussi de ses poèmes. Comme nous pouvons le découvrir dans un dictionnaire, le sapate est un présent considérable, donné sous la forme d'un autre qui l'est beaucoup moins, un citron par exemple, et il y a dedans un gros diamant Le poète n'aurait-il pas une démarche didactique vis-à-vis de son lecteur ? [...]
[...] Son œuvre reste pour une partie ouverte sur l'individu. Des poèmes comme Le Gymnaste La jeune mère R.C. Seine ou encore Le restaurant Lemeunier rue de la Chaussée d'Antin prouve que le poète appréhende l'homme tant en collectivité que comme individu. Enfin, un poème en prose comme Le morceau de viande illustre à l'extrême la vanité de la condition humaine en rabaissant l'individu à toute son inhumanité : Chaque morceau de viande est une sorte d'usine, moulins et pressoirs à sang Conclusion Le parti pris des choses se pose comme un manifeste exhortant l'individu à faire parler les choses. [...]
[...] Existent-ils vraiment par eux-mêmes ? L'anti-lyrisme de Ponge L'auteur du Parti pris des choses récuse la vulgarité lyrique n'appréhende en aucun cas son œuvre affectivement et prétend dresser l'objet contre le sujet. Nous l'avons constaté, le monde de l'inanimé, du muet se pose comme son principal site d'élection. En revanche, comme l'énonce Michel Collot, Ponge fait preuve dans son œuvre d'un lyrisme inattendu Dans certains poèmes, au moment où l'objectivité parait parfaitement établie, une pointe de subjectivité apparait. Avec son poème intitulé De l'eau l'auteur se trahit plus que de coutume : Plus bas que moi, toujours plus bas que moi se trouve l'eau. [...]
[...] Le titre du recueil choisi par le poète demeure ambigu. En effet, Ponge prend le parti des choses avec fermeté. Il les défend de façon partiale, adopte une attitude combative et militante. Il parait peu probable que le poète se pose comme un homme désabusé, résigné en écrivant un titre interprétable de la façon suivante : j'en prends mon parti Quelle place Ponge réserve-t-il à l'Homme et à son moi de poète en produisant une poésie basée sur la matérialité des choses ? [...]
[...] Le poème et le mot sont eux aussi matière, des choses que l'on se doit d'observer minutieusement et d'appréhender dans leur matérialité et leur dimension historique. Exercice de rééducation verbale C'est par dégoût de la langue commune que Ponge en ai venu à écrire des poèmes. Il pose un regard satyrique voire politique sur l'attitude mécanique que la société adopte vis-à-vis des mots. Pour l'auteur qui opte pour une position poétique énergique, modifier le langage devient une nécessité vitale. Il ne peut plus rencontrer sans cesse des mots viciés, pervertis par le lien social. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture