Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois, dit le proverbe. Dans l'apologue Petite digression (Le philosophe ignorant, 1766), Voltaire imagine comment même un aveugle peut devenir roi, à la condition de prétendre détenir un savoir sur ce que désirent les autres.
Prétendant ainsi connaître les couleurs, il acquiert le pouvoir et fait basculer sa petite communauté dans la guerre civile. Voltaire suggère ainsi un lien entre l'ignorance, la dictature et la servitude volontaire. Nous étudierons d'abord la dynamique de cette anecdote politique, puis nous montrerons quelle critique des jugements infondés déduire de ce récit (...)
[...] La petite digression est un titre ironique Ca se présente comme un divertissement et ça débouche sur des idées très importantes. Voltaire cherche à la fois la surprise et l'amusement du lecteur pour le faire réagir sur son époque. Comparer Fontenelle (fin XVIIe) et Voltaire (milieu XVIIIe) On retrouve la même critique de l'ignorance et du charlatanisme, et l'idée que la plupart des gens préfèrent cette situation à la méthode rationnelle défendue par Fontenelle. On retrouve également le ton ironique. [...]
[...] Voltaire va donc plus loin que Fontenelle parce qu'il aborde le domaine religieux. Evidemment la cécité est elle-même un symbole à prendre au sens figuré : pour Voltaire les hommes sont aveuglés par leur ignorance. Au contraire, lui et ses amis ont foi dans la connaissance, le progrès, ce qu'ils appellent les Lumières L'opposition aveugles / voyants symbolise donc l'opposition gens éclairés / Lumières Enfin la mention du sourd après l'anecdote suggère un autre idéal de Voltaire : on est souvent prêt à reconnaître les erreurs des autres (ici, le sourd voit les erreurs des aveugles), mais pas les siennes (le même sourd ne s'aperçoit pas pour autant qu'il est dans la même erreur qu'eux). [...]
[...] De quoi tire-t-il son pouvoir ? D'un discours sur ce que les autres ne peuvent pas vérifier, la vue. Personne ne vient contester ses affirmations : le pouvoir est exercé souverainement absolu, sans partage. Le narrateur est très critique comme le montre les mots à connotation péjorative : adverbe malheureusement + le verbe prétendit qui suggère le mensonge : le lecteur sait que les notions d'un aveugle sur la vue ne peuvent pas être claires (cette absurdité est donc presque une antithèse ironique). [...]
[...] Niveau Première S Voltaire : Petite digressrion Petite digression, Voltaire 1 LE TEXTE Dans les commencements de la fondation des Quinze-Vingts, on sait qu'ils étaient tous égaux, et que leurs petites affaires se décidaient à la pluralité des voix. Ils distinguaient parfaitement au toucher la monnaie de cuivre de celle d'argent ; aucun d'eux ne prit jamais du vin de Brie pour du vin de Bourgogne. Leur odorat était plus fin que celui de leurs voisins qui avaient deux yeux. [...]
[...] Les seuls opposants au dictateur, dans le texte, sont des novateurs des esprits forts des rebelles : le chef utilise ces mots comme des insultes, mais ils peuvent aussi représenter Voltaire et les autres écrivains qui, comme lui, se sont risqués à critiquer les idées qui jusqu'alors étaient réputées infaillibles. Pourquoi l'histoire se passe-t-elle au Moyen Age ? Premièrement, parce que le Moyen Age est l'époque où l'Eglise a eu le plus de pouvoir et où elle a dirigé la façon de vivre des gens. Voltaire qualifiait ainsi cette époque d'obscurantiste. Deuxièmement, pour éviter de parler directement de sa propre époque. [...]
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