Dernier épisode dans lequel le héros Perceval apparaît aux lecteurs (Le conte du Graal étant resté inachevé et interrompu lors des aventures de Gauvain), ce chapitre nous révèle un aspect peu connu jusqu'ici dans le roman de chevalerie : une dimension religieuse qui ne se trouvait pas dans les autres romans de Chrétien de Troyes. Perceval n'est pas un chevalier confronté au problème de concilier amour et chevalerie, il est un nice qui, au cours de nombreuses aventures et mésaventures, fera son instruction afin de devenir un chevalier accompli et reconnu de tous comme tel (particulièrement de la cour d'Arthur). Mais, surtout, Perceval ne se doit pas seulement de respecter un code moral et accomplir des prouesses comme les autres chevaliers, il est confronté, peu après son adoubement par Gornemant de Goort et sa prouesse chevaleresque au château de Beaurepaire, à une cérémonie d'ordre religieux au château du Graal.
[...] Perceval, chevalier, est vêtu d'une armure qui le protège dans ses nombreux combats, combats au cours desquels il verse le sang, blesse et tue. Celui- ci commet le mal tous les jours, en tuant des hommes, il viole le commandement religieux : "Tu ne tueras point". Perceval dit à l'ermite : "Je n'eus ni amour ni crainte de Dieu et ne fis rien que le mal". Un chevalier souille son âme en tuant des hommes et c'est en prenant conscience de cela que Perceval se purifie un peu de cette souillure avant de faire pénitence. [...]
[...] En abandonnant ainsi sa mère Perceval a péché contre l'un des plus importants dix commandements. Et c'est ce péché contre la loi de Dieu qui est cause de son échec, Chrétien de Troyes insiste sur ce fait : "il advint que", "ton malheur est venu . "le péché te trancha la langue", l'ermite reprend le schéma des phrases de Perceval en, dissociant la lance et le Graal et en insistant sur la raison de ce silence : "Le péché te trancha la langue, quand tu ne demandas pourquoi la lance que tu vis devant toi ne cessait de saigner, et ton sens t'abandonna quand tu négligeas d'apprendre qui l'on servait du Graal". [...]
[...] Perceval est torturé par ses remords et l'idée de sa responsabilité dans la destruction du monde, "J'en ai bien souffert depuis . " dit-il. Perceval, comme le fait remarquer Jean Frappier donc oublié Dieu par un regret obsédant d'avoir manqué l'aventure du Graal". La faute de Perceval est aussi l'oubli, il a oublié sa mère puis Dieu, cette absence de souvenir correspondant à l'égarement intérieur qui l'envahit. Pour remédier à cet oubli, Perceval a besoin de prendre conscience ; et il faudra que Perceval prenne lentement conscience de son péché et qu'il sente le poids de plus en plus pesant du remords pour qu'il puisse gravir le chemin du repentir et ainsi se libérer du péché. [...]
[...] Les chevaliers pénitents en robe de laine sans souliers lui disent : "Certes, il n'est pas bien, il est très mal d'être en armes au jour que mourut Jesus-Christ" 176). Perceval met pied à terre . il n'est plus le jeune homme sûr de lui, arrivant en "conquérant" dans le château du roi Arthur sur son cheval, ce n'est plus l'impulsion de la jeunesse mais la réflexion de la détresse qui le fait agir. Ce sont ses remords qui le tourmentent. [...]
[...] Mais jusqu'à cet épisode, Perceval ignorait le caractère religieux de la cérémonie à laquelle il avait assisté et se reprochait son silence sans se l'expliquer. Nous allons donc étudier dans un premier temps Perceval en tant que chevalier dans ce texte, puis les remords de Perceval et enfin le caractère de l'intervention de l'ermite : Perceval apparaît donc comme un chevalier confirmé au bout de ces cinq ans ; mais c'est un chevalier qui a oublié Dieu et ses devoirs religieux. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture