Bien que la première représentation de la pièce de Sophocle,
[...] En effet, une interprétation plus fine de la pièce nous invite à considérer le personnage éponyme comme un autodidacte, un homme qui n'accepte pas ses limites et qui cherche à être plus fort que le destin. Ainsi, la mutilation qu'il s'impose est un geste d'homme libre : " Ce fut Apollon, amis, Apollon / qui lança les maux que voici, les maux / sur moi que voici, sur moi, ces horreurs / Mais la propre main et la seule / qui m'a frappé, c'est bien la mienne ! En s'infligeant lui-même sa punition, il prive les dieux de ce pouvoir. [...]
[...] Le destin n'est pas seulement une parole, il entre dans la réalité et se déroule tel qu'il a été énoncé, aidé par les interprétations erronées : Œdipe quitte le royaume de Corinthe, croyant échapper au destin, et ce destin le retrouve en chemin. Et c'est à travers l'oracle que le destin non seulement se divulgue, mais encore se réalise. Toute la trajectoire d'Œdipe est marquée du sceau des oracles : dès la naissance, il est condamné par un oracle. C'est encore un oracle qu'Œdipe consulte à Delphes pour élucider son identité d'enfant supposé et qui lui fait quitter Corinthe, pour s'éloigner de Polybe et Mérope. [...]
[...] En se crevant les yeux, il se condamne à vivre dans les ténèbres. Par ailleurs, maintenant que la vérité est découverte, il se considère indigne de continuer à regarder les autres. Vivre dans la honte est plus dur que de mourir : De quels yeux, dis-moi, aurais-je regardé mon père, en arrivant chez les morts, et aussi ma pauvre mère, après les crimes que j'ai commis envers eux, et pour lesquels ce serait trop peu que de m'étrangler Le châtiment que s'inflige Œdipe s'inscrit dans la conception contemporaine de la justice : le coupable est punit ce qui assure la cohésion de notre société. [...]
[...] En effet, bien qu'il se tienne pour seul responsable des malheurs qui frappent sa cité, Oedipe est innocent aux yeux du spectateur. On ne peut le considérer comme coupable puisqu'il n'a pas commis les crimes qu'on lui impute en connaissance de causes. A ce propos, René Girard écrit dans La violence et le sacré : "Œdipe n'est pas coupable au sens moderne mais il est responsable des malheurs de la cité. Son rôle est celui d'un véritable bouc émissaire humain." Il est victime du passé, de la malédiction divine. [...]
[...] L'intérêt actuel d'Œdipe Roi réside selon moi dans sa vocation à nous faire réfléchir sur le concept de responsabilité, ce qui implique également une évolution de la notion de liberté telle que nous pouvons la concevoir. En effet, la pièce de Sophocle marque un changement majeur dans la conception du héros tragique (et donc de l'être humain) qui ne veut plus être le jouet du destin, mais qui revendique la responsabilité de tous les actes qu'il a commis, même de manière inconsciente. [...]
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