Il convient de déterminer quelle est la nature de cette musique qu'évoquent les poètes symbolistes. Elle suppose la dimension musicale du matériau verbal : il y a une musique des mots.
Toutefois, les poètes ne se sont pas contentés d'une ornementation musicale : ils ont cherché à interpréter une musique symphonique.
Pourtant, même si les poètes ont voulu superposer ces deux arts, il n'en reste pas moins que la musique poétique n'est qu'une « transposition au livre de la symphonie », autrement dit, une musique imitative (...)
[...] Les poètes symbolistes ont donc produit l'imitation d'une structure de la musique. Par exemple, La fugue de mort de Celan est plus une imitation de la structure du genre de la fugue musicale, par le biais de la superposition dans le langage de différentes voix, d'une polyphonie qui par sa construction est analogique à la fugue musicale. De même, Le coup de dés de Mallarmé est une transposition au livre de la partition musicale. Le poème joue de la grosseur des caractères, des blancs typographiques, de la disposition des mots sur la page, qui peuvent être considérés comme autant de pianissimi ou de fortissimi, de soupirs. [...]
[...] Ils décrivent un fragment de la nature en tant que peinture sonore. Les harmonies imitatives faites d'assonances et d'allitérations renforcent cette impression que le signifiant du mot est presque onomatopéique, que le mot à travers sa sonorité est la chose. La musique qu'interprètent les poètes de la fin du XIXème siècle n'est donc que symbolique, où musique et poésie s'interpénètrent dans ces recherches de nuances, d'impressions, de suggestions, d'imprécision descriptive. Au terme de cette analyse, nous avons mis en évidence l'attitude extrême de poètes qui ont voulu superposer musique et poésie. [...]
[...] C'est parce que ces deux arts ont eu à la fin du XIX ème siècle des buts communs qu'il y a une forte analogie entre ces deux arts. En effet, bien que la musique et la poésie n'utilisent pas le même langage, ils parlent la même langue, qui touche la sensibilité du cœur et non l'esprit, qui ne doit pas décrire, mais faire ressentir. C'est pourquoi il y a eu pendant la période symboliste une opposition entre signification et sensible, signifiant et signifié, c'est-à-dire que le sens du poème est stigmatisé au profit d'un chant de la parole, qui, comme ces comptines pour enfant qui bercent et endorment l'être, fait perdre leur sens aux mots, libère les mots de leur sens et en fait des notes de musique. [...]
[...] Faire de la musique selon les poètes symbolistes c'est utiliser la syllabe comme note. La lecture du poème serait donc proche du chant, où la voix parlée est considérée comme un instrument à part entière. Quelle est la nature de la musique en poésie ? La perception de la musique dans la poésie tire d'abord sa réalité effective de la manière de lire le poème, dans sa diction. Selon que l'on fait du poème une lecture métrique, syntaxique, ou bien chantée, l'interprétation du vers devient ambiguë. [...]
[...] La musique poétique serait une re-présentation de la musique, autrement dit, une imitation et une transposition. Ce bien qu'il faut reprendre à la musique, est plus une idée ou une essence de la musique. En effet, il faut replacer l'affirmation de Mallarmé Je fais de la Musique dans son contexte énonciatif. Mallarmé précise ce terme de musique : il remonte à son sens grec, au fond signifiant Idée ou rythme entre des rapports ; là, plus divine que dans son expression publique ou symphonique Mallarmé ne veut donc pas imiter la musique instrumentale, mais remonter à l'idée de la musique, c'est-à-dire au rythme. [...]
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