La lettre à D'Alembert de Rousseau de 1758 transcrit la vision du philosophe des Lumières quant à son appréciation des spectacles dans la ville de Genève. Dans son article « Genève » de l'Encyclopédie de 1757, D'Alembert avait manifesté son souhait d'y installer un théâtre, ce à quoi Rousseau s'oppose. Pour lui, le théâtre ne peut pas servir le public à dessein d'éducation, il le pervertit en promouvant le « ridicule de la vertu ».
C'est ainsi que Rousseau décrie Molière en lui prêtant un caractère pernicieux au sujet de la morale de ses pièces. Particulièrement visible dans le Misanthrope, Molière développe une visée, selon Rousseau, qui n'est autre que le besoin de faire rire sans se soucier des possibles conséquences, tel le trouble de l'ordre tout entier de la société. Le philosophe des Lumières dénonce ainsi une écriture de Molière qui dénature le personnage d'Alceste et lui donne une tout autre face.
[...] C'est ainsi que Rousseau déplore un caractère trop ridicule d'Alceste, mais il n'est pas réellement perçu comme tel. Le personnage prête à rire, certes, mais il n'est pas pour autant dédaigné des spectateurs ; en tant que personnage principal d'une comédie, il est avant tout divertissant. Enfin, les critiques de Rousseau envers le degré de perfection du misanthrope dans son combat contre les vices nient tout principe de réalisme, Alceste ne déteste pas la compagnie des hommes certes, mais il en a même besoin. [...]
[...] De plus, Alceste ne mérite pas la qualification de véritable misanthrope car il n'est pas l'ami de tout le monde, en effet il repousse les plus vils. Par ailleurs une telle force de caractère suscite toujours intérêts et captivations, en dépit de possibles brutalités, non seulement chez certains autres personnages, mais aussi chez les spectateurs, qui ne sont pas tentés de l'imiter, mais ne sont pas pour autant gênés devant lui. Cette absence de gêne pour Rousseau est le fruit de la personnalité probe d'Alceste, malgré ses défauts, que Molière en tant qu'honnête homme a bien retranscrit. [...]
[...] Ainsi, le degré de misanthropie du protagoniste n'est pas l'élément crucial de la pièce, il faut surtout le concevoir comme étant irrémédiablement opposé à la nature des autres personnages. Rousseau défend à la fin de son propos l'idée d'un misanthrope toujours furieux contre les vices publics et toujours tranquille sur les méchancetés personnelles Or, un tel personnage serait qualifié d'indigné et il est difficile de ne pas le voir comme étant profondément attaché à la nature humaine et à ses semblables, d'où la contradiction avec la qualification de misanthrope. [...]
[...] Le Misanthrope dans la lettre à D'Alembert de Rousseau La lettre à D'Alembert de Rousseau de 1758 transcrit la vision du philosophe des Lumières quant à son appréciation des spectacles dans la ville de Genève. Dans son article Genève de l'Encyclopédie de 1757, D'Alembert avait manifesté son souhait d'y installer un théâtre, ce à quoi Rousseau s'oppose. Pour lui, le théâtre ne peut pas servir le public à dessein d'éducation, il le pervertit en promouvant le ridicule de la vertu C'est ainsi que Rousseau décrie Molière en lui prêtant un caractère pernicieux au sujet de la morale de ses pièces. [...]
[...] Dans un second temps, Rousseau procède à une critique de l'usage du personnage d'Alceste par Molière. Le premier reproche adressé concerne les soucis inquiétant le protagoniste, qui ne devraient pas être d'ordre personnel ou puéril comme dans la conversation introductive avec Philinte, mais bien en rapport avec sa personnalité de bon misanthrope. Or, il s'emporte assez rapidement face au flegme de son ami, il ne prépare son procès par fierté et opposition aux conseils qu'on lui donne, il s'impatiente contre son valet Du Bois lorsqu'il est simplement étourdi, il n'ose pas affronter directement Oronte au début de la scène du sonnet. [...]
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