Avec les Quatre premiers livres des Odes, Ronsard signait dès 1550 (à 26 ans) un premier recueil qui précisément montrait la voie vers une poésie humaniste qui assume directement sa filiation avec le lyrisme antique.
Et cette célèbre ode à Cassandre, ce Mignonne, allons-voir si la rose est une parfaite illustration d'un art de l'épanchement des sentiments intimes (...)
[...] Derrière la simplicité apparente d'un homme amoureux qui exprime une hâte à aimer et être aimé, on trouve à la fois des indices sur la personnalité du poète (Ronsard se perçoit en homme expérimenté, sage et lucide qui joue un peu les mentors auprès d'une Cassandre candide et inconsciente) ; une philosophie de la vie qui a une dette humaniste à l'égard de l'épicurisme ; une stratégie argumentative assez manipulatrice qui s'emploie à créer chez la femme à conquérir la peur devant le temps et la fuite de la beauté afin d'en . recueillir des profits charnels! [...]
[...] _ L'assimilation de la rose à la femme domine toute la strophe et en constitue la logique centrale. Dès le premier vers, rose est associé à Mignonne ; ce mot trahissant à la fois la tendresse de Ronsard et une évocation de la grâce de la silhouette de Cassandre. A travers sa robe de pourpre puis les plis de sa robe pourprée ; Ronsard précise le rapprochement : la rose est décrite telle une jeune fille avec sa robe. Enfin, le vers 6 confirme directement la comparaison puisque la couleur de la rose est dépeinte comme étant une teinte au votre pareil.» _ La beauté de la femme sort valorisée de cette mise en rapport avec la rose. [...]
[...] Ensuite parce que le poète s'appuie sur une accumulation pour appuyer les différents aspects de la beauté : cette vesprée sa robe pourprée son teint.» _ Une trace d'une ambiguïté dans la célébration : Mais cette beauté semble déjà hypothétiquement altérable puisque Ronsard s'interroge sur la lumière du soleil capable d'affaiblir (ou de concurrencer!) l'éclat propre au rouge de la rose (donc de Cassandre) : ( ) allons voir si la rose ( ) a point perdu cette vesprée.» De même, la structure d'ensemble de ce sizain est révélatrice : elle a une limpidité très ordonnée dans le style antique : les 3 premiers vers constituent une partie (la beauté de la rose du matin) qu'une virgule vient parfaitement séparer d'une seconde partie (l'interrogation sur la beauté de la rose le soir.) Cette structure est une révélation d'une intention du poète qui se confirmera au sizain suivant : l'invitation à se promener du début a un objectif bien précis qui va se servir de la symbolique de la rose pour arriver à terme. II) Le déclin de la beauté : Annoncée par l'interrogation implicite des vers 3 à voici le sizain qui décrit la rose du soir : effeuillée, à terre, dépossédée de sa beauté. _ La transition est volontairement brutale dès le début du sizain : Las! [...]
[...] _ Les deux thèmes de la Rose et de la Femme : ce fameux rapprochement est renversé et marque donc un changement significatif. C'est la femme à laquelle il s'adresse qui à présent se retrouve comparée à la fleur : votre âge fleuronne (sa jeunesse de maintenant qui est épanouie est vouée à se faner) ; sa plus verte nouveauté (comme la rose du matin, l'éclat de la beauté de Cassandre est dans sa pleine fraicheur) ; impératif cueillez votre jeunesse fait de l'âge de Cassandre l'équivalent de ce qui est éphémère comme la rose. [...]
[...] et son impatience d'homme amoureux qui trouve Cassandre peu pressée de l'aimer! Naturellement ce cueillez votre jeunesse est un écho explicite du fameux vers du poète épicurien Horace avec son Carpe Diem Cueille le jour présent Les deux derniers vers, par la façon très directe et répétée avec laquelle ils reviennent sur la beauté de Cassandre vouée à disparaître très vite, ont un côté pervers et cruel : Ronsard fait rimer comme une menace jeunesse et vieillesse pour terminer sur un futur prophétique fera : aucun doute sur le destin des charmes de Cassandre) et une formulation sans appel ternir votre beauté qui apparaissent comme un chantage! [...]
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