Le poème A une mendiante rousse, de Charles Baudelaire, est issu des Tableaux Parisiens rajoutée à la seconde édition de Les Fleurs du Mal en 1861.
Il s'inscrit dans la perspective générale du recueil : montrer la beauté du mal et de la misère.
Dans ce long poème de quatorze strophes, avec des strophes hétérométriques, Baudelaire décrit une jeune mendiante rencontrée dans Paris.
Le poète fait l'éloge paradoxal de la jeune fille à qui il s'adresse directement, et à qui il dédicace le poème (ces poèmes dédicaces sont nombreux dans le recueil Les Fleurs du Mal) (...)
[...] Blanche fille aux cheveux roux, Dont la robe par ses trous Laisse voir la pauvreté Et la beauté, Pour moi, poète chétif, Ton jeune corps maladif, Plein de taches de rousseur, A sa douceur. Tu portes plus galamment Qu'une reine de roman Ses cothurnes de velours Tes sabots lourds. Au lieu d'un haillon trop court, Qu'un superbe habit de cour Traîne à plis bruyants et longs Sur tes talons ; En place de bas troués, Que pour les yeux des roués Sur ta jambe un poignard d'or Reluise encor ; Que des nœuds mal attachés Dévoilent pour nos péchés Tes deux beaux seins, radieux Comme des yeux ; Que pour te déshabiller Tes bras se fassent prier Et chassent à coups mutins Les doigts lutins, Perles de la plus belle eau, Sonnets de maître Belleau Par tes galants mis aux fers Sans cesse offerts, Valetaille de rimeurs Te dédiant leurs primeurs Et contemplant ton soulier Sous l'escalier, Maint page épris du hasard, Maint seigneur et maint Ronsard Épieraient pour le déduit Ton frais réduit ! [...]
[...] Cette ambigüité se retrouve dans la périphrase : blanche fille aux cheveux roux 1). La blancheur de sa peau, mise en valeur par l'opposition de couleur avec les cheveux roux, peut évoquer une pâleur maladive, ou au contraire un aspect aristocratique. La pauvreté est elle pour la jeune fille un atout de séduction ? Ou le poète ne se réfère t il pas à une caractéristique plus personnelle, sa carnation de rousse ? Une analogie est faite entre la mendiante et le poète qui est lui aussi chétif 5). [...]
[...] On note la gradation dans la condition sociale des admirateurs de la jeune fille, montrant que du page au roi, ils en sont tous amoureux. A cet égard il est ironique de remarquer que le poète, représenté par Ronsard, s'il est en dessous du roi, évoqué par la dynastie royale des Valois, est néanmoins au-dessus du seigneur. B Le retour à la réalité Le vers 46 marque un brusque retour à la réalité, avec une rupture par rapport à la longue phrase précédente correspondant à la rêverie du poète 13-41) : - Cependant tu vas gueusant 46). [...]
[...] Charles Baudelaire est un poète charnière dans l'histoire de la poésie : c'est le dernier des romantiques par son tempérament. Il est aussi le premier poète moderne et l'ancêtre du symbolisme par son écriture poétique et sa théorie des correspondances. C'est un romantique car Les Fleurs du mal utilise largement le sonnet. Les thèmes sont romantiques : le spleen provient du mal du siècle des romantiques et on retrouve aussi le principe de la condition humaine partagée entre le spleen et l'idéal. [...]
[...] - des images : la mendiante est comparée à une reine. B Une analogie avec une reine Dans l'imagination du poète la mendiante va se transformer en reine. A cet effet il utilise une longue comparaison : Tu portes plus galamment / Qu'une reine de roman / Ses cothurnes de velours / Tes sabots lourds 9-12). On note l'antithèse entre : - la pauvreté, évoquée par le champ lexical ci-dessus, et utilisé pour décrire la mendiante - la richesse, appliquée à la reine imaginée par le poète Les détails vestimentaires s'accumulent pour évoquer la richesse de la reine : - les cothurnes de velours 11) et le superbe habit de cour 14) aux plis bruyants et longs 15) s'opposent à la robe trouée et au haillon. [...]
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