Le passage étudié, extrait de Madame Bovary de Gustave Flaubert, se situe après le mariage de l'héroïne avec Charles Bovary et juste après un long retour en arrière sur son éducation au couvent : ses aspirations puis sa rencontre déterminante avec la lingère, qui l'initiera à la littérature à l'eau de rose.
Le début du chapitre VII se caractérise comme étant l'un des premiers monologues intérieurs, chose nouvelle, il donne ainsi accès au courant de conscience de la jeune femme. On s'aperçoit vite que face à la vie dont elle avait rêvé à travers les livres, son mariage avec Charles la déçoit (...)
[...] Et, si le jeu sur le langage est une expérience amusante pour Flaubert, cela ne l'est pas pour Emma, marionnette entre ses mains elle se retrouve reléguée au rang de non-personne (si tant est qu'un personnage, être de papier, puisse être envisagé ainsi). Elle n'a pas de réelle intériorité ou bien une d'emprunt, puisque son imaginaire est celui d'autres. Plus qu'un livre sur madame Bovary, Flaubert signe un livre sur les livres où la dimension intertextuelle est irréductible, livre sur rien un livre qui tienne tout seul ! [...]
[...] Flaubert crée ainsi un paradigme qu'il peut décliner à l'infini. De plus, si Emma semble à l'évidence attirée par l'exotisme ces pays à noms sonores certains lieux sur terre l'accumulation qui nous est donnée de voir rappelle certes l'idée de voyage, mais ne donne absolument pas l'impression de mouvement, qui devrait pourtant logiquement aller de pair. On assiste au contraire à un assemblage de topoï juxtaposés de manière farfelue. Certains semblent même incompatibles : par exemple, le parfum des citronniers non loin de la montagne ce qui donne un aspect loufoque au texte puisque cela crée un paysage impossible. [...]
[...] C'est le choix de la facilité, du vague. L'important est donc de considérer ce texte à partir de ceux qui l'ont précédés, de mettre en rapport une individualité (Emma Bovary, ses pensées les plus intimes) avec cet ensemble de textes que le lecteur de l'époque connaît et qui sont désignés comme étant à l'origine des désirs de l'héroïne, de ses troubles, de ce que Flaubert appelle les moisissures de l'âme Se faisant, on comprend que Flaubert pour critiquer le romantisme bon marché plutôt que de faire un pamphlet, préfère que l'énoncé se détruise seul. [...]
[...] Il faut cependant préciser que ce n'est pas directement le mouvement romantique et ses chefs de file que Flaubert attaque mais, bien davantage, la vulgarisation qui a suivi et les petits romantiques : cette littérature bon marché à l'eau de rose par laquelle Emma a été pervertie au couvent. Les armes de Flaubert sont les fonctions démystificatrice et parodique (dans cet extrait comme d'ailleurs dans l'ensemble du roman). Pour cela, il lui faut utiliser la matière même de du texte romantique. [...]
[...] C'est la voix des autres qu'on entend. Emma dit dans un autre extrait de Charles que conversation était plate comme un trottoir de rue, et des idées de tout le monde y défilaient dans leur costume ordinaire» mais la métaphore peut tout aussi bien illustrer ses propres pensées. Car, le personnage accueille dans son discours un autre discours qui n'est autre que l'écho du discours des autres, des idées reçues. Et ce présent de fiction qui survient dans le texte, encastré dans le monologue intérieur, ne s'explique surtout pas par le présent de vérité générale. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture