Malgré une chute malencontreuse, sous les yeux de la jeune femme et les moqueries de ses camarades de régiment, ce moment révèle la naissance de l'amour alors même que l'échange des regards ne dure qu'un instant et que les deux personnages sont séparés (...)
[...] Les officiers du régiment riaient, mais exprès, comme un membre du centre, à la chambre des députés, quand on fait aux ministres quelque reproche fondé. - Quoique ça, c'est un bon lapin, dit un vieux maréchal des logis à moustaches blanches. - Jamais cette rosse n'a été mieux montée, dit un lancier. Lucien était rouge mais affectait une mine simple. La scène de première rencontre où l'amour est vécu comme un coup de foudre, au premier regard échangé, est un lieu commun du roman. Le texte à étudier, extrait de Lucien Leuwen, roman inachevé de Stendhal, publié en 1855, reprend ce motif romanesque traditionnel. [...]
[...] Bien que la rencontre entre Lucien et la belle inconnue soit fugitive et chargée d'ambiguïté, on peut l'interpréter comme le début d'une relation amoureuse. III- ENFIN, UNE RENCONTRE QUI CREE UN EFFET D'ATTENTE Malgré une chute malencontreuse, sous les yeux de la jeune femme et les moqueries de ses camarades de régiment, ce moment révèle la naissance de l'amour alors même que l'échange des regards ne dure qu'un instant et que les deux personnages sont séparés. Ambiguïté de la chute : la chute finale est inattendue, surprenante, compte tenu de l'intensité du regard entre les deux jeunes gens et de la rapidité de l'évocation de cet incident. [...]
[...] Ainsi cette scène de rencontre, qui reprend un motif traditionnel du roman, le renouvelle en le mettant en scène dans un contexte réaliste, défavorable à la naissance de l'amour et en le traitant de manière satirique. Par ailleurs, cet extrait reflète les thèmes chers à Stendhal : la cristallisation qui pare l'être aimé de toutes les perfections et l'opposition des héros, personnages d'exception, les happy few à une réalité odieuse et mesquine. [...]
[...] En effet, Lucien remarque qu'elle souriait encore, que déjà il était remonté. Les officiers du régiment riaient, mais exprès, comme un membre du centre, à la chambre des députés, quand on fait aux ministres quelque reproche fondé. Elle aussi prend un air dédaigneux qui rappelle le mépris de Lucien à l'égard des provinciaux. Comme lui, elle préfère ne pas se mêler à la foule des gens vulgaires puisqu'elle est à demi cachée par le rideau de mousseline brodé de sa fenêtre Le regard qu'ont échangé les deux jeunes gens dans la foule des gens vulgaires, est donc un signe de reconnaissance qui leur a permis de se reconnaitre et de constater qu'ils appartiennent au même monde, celui des personnages d'exception. [...]
[...] Lucien se complaisait dans cette idée peu polie lorsqu'il vit la persienne vert perroquet s'entrouvrir un peu ; c'était une jeune femme blonde qui avait des cheveux magnifiques et l'air dédaigneux : elle venait voir défiler le régiment. Toutes les idées tristes de Lucien s'envolèrent à l'aspect de cette jolie figure ; son âme en fut ranimée. Les murs écorchés et sales des maison de Nancy, la boue noire, l'esprit envieux et jaloux de ses camarades, les duels nécessaires, le méchant pavé sur lequel glissait la rosse qu'on lui avait donnée, peut-être exprès, tout disparut. Un embarras sous une voûte, au bout de la rue, avait forcé le régiment à s'arrêter. [...]
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