Fiche de lecture sur le livre II du De Finibus de Cicéron.
[...] Esse enim, nisi eris, non potes, XXIII, 78). Etre l'ami d'une personne dépend de l'amour, ce qui est différent de l'intérêt. Alors que Torquatus avait prétendu que Cicéron ne pourrait pas expliquer l'amitié autrement que par un calcul d'utilité, celui-ci la définit comme un sentiment qui se produit seul, spontanément (ipsum a se oritur et sua sponte nascitur). En effet, se rattacher à l'utilité ne lui semble pas moins aléatoire ; dans la mesure où l'utilité est contingente, elle ne peut constituer une base solide à l'amitié. [...]
[...] Torquatus semble céder devant cet argument, sans pour autant renoncer à sa position : il conçoit que si plaisir et absence de douleur sont une seule et même chose, il précise qu'il existe plusieurs sortes de plaisirs : plaisir stable (lorsque l'on n'a pas soif) et plaisir en mouvement (lorsque l'on a soif). Son argumentation apparaît de plus en plus difficile à soutenir. Cicéron s'interroge sur la pertinence de l'assimilation de sentiments, de sensations si différents à une seule notion. D'après Torquatus, le plaisir peut varier, mais il ne peut pas s'accroître au-delà de toute douleur. Cela ne convainc pas Cicéron, pour qui on éprouve davantage de plaisir à boire lorsque l'on a soif que lorsqu'elle est étanchée. [...]
[...] Cette idée va à l'encontre de la thèse défendue par Torquatus. Les incohérences résident donc, d'une part dans le fait que d'après Torquatus, le plaisir ne peut augmenter alors même qu'il en existe plusieurs sortes ; d'autre part dans le fait que ne pas souffrit puisse être assimilé à ressentir du plaisir. Si, comme Torquatus, l'on soutient que le plaisir ne peut être plus grand que dans l'absence de douleur, cela implique une passivité des homme, et l'inutilité pour eux de rechercher le plaisir, ce qui semble aller à l'encontre de la philosophie épicurienne. [...]
[...] Quant à la douleur, Cicéron est très sceptique sur la façon dont Epicure la traite. Il trouve absurde sa prétendue méthode pour la combattre, de même que son affirmation selon laquelle une douleur vive est forcément brève je ne vois pas bien ce que cela signifie, XXIX, 94). L'ironie dont Cicéron sait faire preuve trouve ici encore à s'appliquer. Selon lui, seules des vertus tel le courage, la patience et la grandeur d'âme peuvent prétendre calmer la douleur (XXIX, ce qui le rapproche des philosophies stoïcienne ou académicienne. [...]
[...] Il nous parait intéressant d'expliquer la variation de la structure du discours dans ce livre. Il semble a priori que la préférence de Cicéron soit allée à la voie dialoguée, bien qu'il ait été contraint au monologue par Torquatus, lassé, semble-t-il, de jouer à l'élève devant répondre, tout en traquant les éventuels pièges dialectiques de son maître. De cette façon, Cicéron a certainement voulu mettre en évidence les faiblesses de l'argumentaire épicurien. En effet, ce livre est une fiction, il ne semble pas que cet échange ait jamais eu lieu, du moins tel qu'il est rapporté dans ce traité. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture