Comme le conte philosophique, la fable est un apologue. En effet, c'est un récit distrayant qui contient une morale, parfois implicite. Dans ses fables, le narrateur a le regard scientifique surplombant d'un zoologue ; cela donne l'impression qu'il domine, qu'il maîtrise les défauts humains et qu'il s'en amuse. Il nous donne également l'impression que les comportements humains appartiennent à des lois naturelles, ce qui les rend d'autant plus dérisoires. Le pouvoir des fables tient dans cet habile mélange de récit et de morale, rappelant les vers initiaux de la fable 1 du Livre VI, Le Pâtre et le Lion :
Les fables ne sont pas ce qu'elles semblent être. [...]
Une morale nue apporte de l'ennui ;
Le conte fait passer le précepte avec lui (...)
[...] Une morale inattendue Alors que la chèvre et le mouton demeurent muets durant tout le voyage, le mouton étant même insulté par le cochon avec une réplique brève et d'une grande vivacité (Il est sot, vers mise en évidence par un rejet, et que le charton prend leur parti (vers 15-16), La Fontaine y intervient ironiquement pour souligner la valeur du raisonnement de Dom pourceau (Dom pourceau raisonnait en subtil personnage, vers 29). La morale va alors opérer un renversement inattendu introduit par la conjonction Mais (vers 30) et annonçant la leçon. [...]
[...] Conclusion À la rudesse un peu âpre de l'apologue antique et médiéval, La Fontaine fait succéder un récit toujours plaisant, mais renouvelé et adouci par la poésie. Loin des discours enflés d'une morale austère, loin des précautions inutiles d'une fausse sagesse qui ne sait pas jouir de la vie, la fable en vers, dans sa simplicité et sa grâce enjouée, fidèle à l'expression de l'idéal classique, persuade en douceur. Mais cette fable présente une morale originale à deux égards : elle reprend dans un premier temps l'exemplum avant de se révéler inattendue, témoignant l'épicurisme de La Fontaine. [...]
[...] Le Cochon, la Chèvre et le Mouton Recueil : II, parution en 1678. Livre : VIII. Fable : 12, composée de 32 vers. Une chèvre, un mouton, avec un cochon gras, Montés sur un même char, s'en allaient à la foire. Leur divertissement ne les y portait pas ; On s'en allait les vendre, à ce que dit l'histoire : 5 Le charton n'avait pas dessein De les mener voir Tabarin Dom pourceau criait en chemin Comme s'il avait eu cent bouchers à ses trousses. [...]
[...] Poèmes, récits chargés d'une dimension morale et saynètes tout à la fois, les Fables choisies mises en vers de La Fontaine (1621-1695) ont été publiées de 1668 à 1693 et n'ont cessé de susciter l'admiration, servant de modèle depuis plus de trois siècles. La fable 12 du livre VIII, Le Cochon, la Chèvre et le Mouton, est située dans le second recueil où le bestiaire et l'imaginaire en liberté du fabuliste s'est nettement amoindri pour s'orienter vers une réflexion plus sérieuse et sentencieuse. [...]
[...] Ils pensent qu'on les veut seulement décharger, La chèvre de son lait, le mouton de sa laine : 25 Je ne sais pas s'ils ont raison ; Mais quant à moi qui ne suis bon Qu'à manger, ma mort est certaine. Adieu mon toit et ma maison. Dom pourceau raisonnait en subtil personnage Mais que lui servait-il Quand le mal est certain, La plainte ni la peur ne changent le destin Et le moins prévoyant est toujours le plus sage. [...]
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