La fable 18 du livre VI, "Le Chartier embourbé", est située dans le premier recueil des Fables. Elle a été inspirée à l'auteur par son prédécesseur antique Ésope avec "Le Bouvier et Héraklès".
(...) Le récit est celui d'une histoire, celle du "Phaéton d'une voiture" (vers 1). Le cadre est rustique, souligné par le champ lexical de la campagne ("à la campagne", vers 3 ; "de basse Bretagne", vers 4 ; "Quimper-Corentin", vers 5). Il convient de rappeler qu'au XVIIe siècle, la Bretagne était difficilement accessible et éloignée de tout, Quimper ayant alors fort mauvaise réputation puisqu'y étaient exilées de nombreuses personnalités de l'époque.
Du point de vue formel, l'exemplum présente une alternance de passé simple pour rendre les actions, surtout brèves ("Vit", vers 2) et d'imparfait pour les descriptions, notamment de la scène d'exposition ("était", vers 2 ; "c'était", vers 3). Cette alternance donne de la vivacité au récit. Pourtant, le récit se poursuit ensuite au présent de narration qui permet au lecteur d'"assister" à l'action qui se déroule ("Le voilà qui déteste et jure de son mieux", vers 10 ; "Il invoque", vers 14 ; "il entend", vers 19 ; "Une voix qui lui parle", vers 20).
De plus, à l'intérieur du récit, on peut relever deux procédés d'animation particulièrement efficaces :
- l'intervention du fabuliste qui s'adresse au lecteur au présent de vérité générale : "On sait assez que le Destin / Adresse là les gens quand il veut qu'on enrage : / Dieu nous préserve du voyage" (vers 6 à 8). Dès le début, en utilisant "On sait", La Fontaine souhaite la connivence du lecteur (...)
[...] Il n'y a donc pas de prise de parole directe du fabuliste. Ainsi, la moralité est un aphorisme contenu et annoncé dans les paroles d'une voix, ce qui signe l'originalité de cette fable, surtout en tant que texte moraliste. Cependant, c'est une morale qui s'élabore progressivement : - d'abord par l'intervention du fabuliste (vers 6 à 8). Déjà évoquée ci-dessus, elle suscite la réflexion du lecteur - ensuite, par le comique de la colère du cocher. Il permet certes au lecteur de sourire mais l'incite à réfléchir plus précisément : ne s'est-il jamais comporté comme le cocher en pareille circonstance ? [...]
[...] Aide-toi, le Ciel t'aidera. Phaéton : fils du Soleil ; il demanda et obtint la permission de conduire le char de son père. Il le mena trop près de la terre au risque de la brûler. Jupiter le foudroya. La Fontaine utilise ce nom d'un dieu par dérision. Quimper-Corentin : c'est à Quimper qu'ont été exilées de nombreuses personnalités de l'époque. ÉTUDE ANALYTIQUE Introduction Recueils poétiques de Jean de La Fontaine (1621-1695), Les Fables choisies mises en vers furent publiées à Paris chez Denis Thierry ou chez Claude Barbin de 1668 à 1693. [...]
[...] Regarde d'où provient L'achoppement qui te retient ; Ôte d'autour de chaque roue 25 Ce malheureux mortier, cette maudite boue Qui jusqu'à l'essieu les enduit ; Prends ton pic et me romps ce caillou qui te nuit ; Comble-moi cette ornière. As-tu fait ? Oui, dit l'homme. Or bien je vas t'aider, dit la voix. Prends ton fouet - Je l'ai pris. Qu'est ceci ? mon char marche à souhait. Hercule en soit loué ! [...]
[...] Il est à noter que le seul décasyllabe souligne la dérision de La Fontaine lorsqu'il présente le nom divin du fils du Soleil : Phaéton. Le choix d'un système hétérométrique produit un effet de dynamisme particulier, accentué par les nombreux enjambements (vers 2-3 De plus, La Fontaine utilise toutes les rimes à sa disposition dans le désordre (croisées, embrassées, plates). Enfin, on relève de nombreuses rimes suffisantes (campagne / Bretagne, vers 3-4 ; Corentin / Destin, vers 5-6). II- La leçon Une leçon facilitée par le comique Fidèle à la doctrine chère aux classiques, La Fontaine va s'évertuer à distraire le lecteur en utilisant le registre comique : - c'est ainsi que Phaéton (vers pourtant référence divine, est ici synonyme de cocher La référence mythologique donne un effet burlesque, le char (vers étant une voiture à foin (vers - c'est ainsi aussi que les brusques changements d'humeur du personnage furieux soulignent le comique du récit par un effet d'accumulation : Le voilà qui déteste et jure de son mieux, / Pestant, en sa fureur extrême, / Tantôt contre les trous, puis contre ses chevaux, / Contre son char, contre lui-même (vers 10 à renforcé par les éléments très hétéroclites qui déclenchent son courroux (trous, chevaux, char, lui-même). [...]
[...] La fable 18 du livre VI, Le Chartier embourbé, est située dans le premier recueil des Fables. Elle a été inspirée à l'auteur par son prédécesseur antique Ésope avec Le Bouvier et Héraklès Cet apologue se retrouve dans Le Quart Livre de Rabelais : C'est sottize telle que du charretier, lequel, sa charrette versée par un retouble, à genoiltz imploroit, l'ayde de Hercule et ne aiguillonnoit ses bœufz, et ne mettoit la main pour soublever les roues (chapitre XXI). La Fontaine utilise son récit pour illustrer la morale, aphorisme resté dans le langage courant comme proverbe. [...]
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