Ce texte, extrait d'Ubu Roi d'Alfred Jarry, présente un dialogue vivant entre le personnage principal, Père Ubu, et son épouse la Mère Ubu. Située au début de la pièce, cette scène remplit les fonctions d'informations et de séduction attachées à l'exposition. Cependant, le grotesque du personnage permet à Jarry d'inaugurer une critique de la société. Jarry utilise aussi Ubu sur scène afin de s'opposer au théâtre naturaliste et a, en fin de compte, dépassé le théâtre symboliste (...)
[...] Ubu Roi est une variante parodique de Macbeth, de Shakespeare. Le Père est un nouveau Macbeth fasciné par le pouvoir et manipul par sa femme (la Mère Ubu), mais aussi dérisoire que Macbeth est un héros tragique. Quant à la Mère Ubu, c'est un condensé caricatural de Lady Macbeth et de la Mégère apprivoisée. Ces personnages à l'expression sommaire font figure de pantins : la capeline, le parapluie et le caban constituent la panoplie de personnages déshumanisés. Jarry les dote de goûts vulgaires Tu pourrais augmenter indéfiniment tes richesses, manquer fort souvent de l'andouille et une psychologie sommaire : la Mère Ubu incarne l'envie, la culpabilité et la bassesse. [...]
[...] Quant à Ubu, il incarne la violence, la bêtise et même la lâcheté. Il s'agit bien d'une parodie de l'épopée et Ubu est un antihéros résumant à lui seul toute la bêtise du monde. Cette scène d'exposition joue ainsi pleinement son rôle informatif, où Jarry nous renseigne sur l'intrigue à venir. Mais il établit également une parodie de la tragédie classique en utilisant des procédés du comique, le langage, la grossièreté, le comportement, les traits de caractère des personnages. Il critique également la société, plus précisément les personnes qui correspondent aux caractères des personnages, la prise de pouvoir, la bêtise. [...]
[...] Nous rencontrons des phrases déclaratives qui posent un constat : Vous êtes un fort grand voyou Ce n'est pas moi, Père Ubu, c'est un autre qu'il faudrait assassiner ; des phrases interrogatives qui traduisent une question : Que voulez-vous de mieux ? l'étonnement : Vous êtes content de votre sort ? des questions rhétoriques : Qui te raccommoderait tes fonds de culotte ? N'ais-je pas un cul comme les autres ? La modalité exclamative est présentée pour exprimer le reproche de la Mère Ubu : tu es si bête ! ou comme un mot interrogatif : comment ! [...]
[...] Mère Ubu, je ne comprends rien de ce que tu dis. MÈRE UBU Tu es si bête ! PÈRE UBU De par ma chandelle verte, le roi Venceslas est encore bien vivant ; et même en admettant qu'il meure, n'a-t-il pas des légions d'enfants ? MÈRE UBU Qui t'empêche de massacrer toute la famille et de te mettre à leur place ? PÈRE UBU Ah ! Mère Ubu, vous me faites injure et vous allez passer tout à l'heure par la casserole. [...]
[...] Cependant, le mari change d'avis, revient sur ses décisions : Oh non ! Moi, capitaine de dragons, massacrer le roi de Pologne ! Plutôt mourir ! Le père Ubu semble indécis. Le chiasme et les anaphores des lignes 46 à 48 gueux et riche maigre et gras brave et méchant rat et chat introduisent une nettes opposition entre sa précarité présente et ce qu'il pourrait devenir s'il écoutait sa femme. Il montre voire une préférence en sa précarité tranquille, ce qui n'est pas l'avis de sa femme. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture