L'oeuvre de Francis Ponge, Le parti pris des choses, publiée en 1942, se résume ainsi : Rendre compte d'objets du quotidien dans un langage minutieux, dans l'observation la plus fine et la plus objective, exalter chacune de ces "choses" en y tirant la poésie la plus inattendue.
Dans son recueil de poésie, l'auteur étudie une kyrielle de ces éléments de la réalité la plus triviale, de la faune, des minéraux, ou de la bonne chère, dont "le pain", qui nous intéresse ici (...)
[...] Commentaire : Francis Ponge, Le parti pris des choses, Le Pain Plan I. Le pain comme un monde à lui tout seul a. La naissance de ce monde b. Un poème en panorama II. Un poème construit sur une opposition a. La beauté de la croute b. La base impure : La mie III. [...]
[...] Aussi pouvons nous imaginer que le brisons-la est une référence à l'eucharistie, le partage du pain messianique. Et, le fut glissée pour nous impersonnel, qui provoque cette genèse miniature dans le four stellaire n'est pas Dieu ? On peut aussi, en extrapolant, supposer que les deux facettes du pain, sa surface [ ] merveilleuse et son lâche et froid sous-sol sont des références directes au paradis et à l'enfer. Toutefois, si l'auteur s'est employé à glisser dans son texte ces références religieuses, c'est pour mieux faire valoir sa morale finale, le pain doit être désacralisé. [...]
[...] La mie est décrite par un vocabulaire particulièrement dépréciatif, dans le champ lexical d'un moelleux écœurant, dans des mots comme mollesse ou lâche et dans sa comparaison à une éponge mais encore dans le champ lexical de la bassesse, au travers de sous-jacente sous-sol Et même les feuilles ou fleurs qui la composent, dans la métaphore des cellules de la mie, finissent par faner, entendez rassir cause directe de la fin du pain-monde : la masse en devient friable C'est ainsi le combat de deux forces, le bel extérieur contre la base impure intérieure, où l'apparence perd la face dans la chute de la vraie matière. Aussi, dans une telle réflexion, ce n'est pas étonnant de retrouver une présence divine, omniprésente. C'est pourquoi ce poème est parcourut de références religieuses, que l'auteur s'est amusé à disséminer dans on poème, et à défaire par la morale. Le pain, dans toutes les grandes religions, particulièrement chrétienne, revêt une importance de premier plan. [...]
[...] C'est d'abord cette représentation de notre planète à l'échelle de la paume d'une main, qui prime sur le poème. En premier lieu, nous constatons que l'histoire du pain de Ponge se construit sur les mêmes étapes que le monde, de sa création au milieu de l'univers, symbolisé par la métaphore du four stellaire du développement de ses formes, dans le champ lexical du relief au travers de mots tels que crevasses vallées ou crêtes jusqu'à sa fin inéluctable traduite métaphoriquement dans le rassissement de ce même pain, rendant la masse [ ] friable Le poète fait de ce pain un monde à part entière, né du même phénomène. [...]
[...] Le jeu de mot final, brisons là nous le fait bien sentir. Pour conclure, nous pouvons dire que le poème travaille à transcender un objet du quotidien, comme dans tout le recueil de Francis Ponge. Et c'est ici en le transformant en un monde à part entière, doué de beauté et de laideur, jusqu'à lui donner un créateur divin. Mais il ne fait pas seulement cela, la morale confère au poème un tournant décisif : Tout ce qu'il a construit est détruit, est brisé le merveilleux qu'il a construit, il faut le trouver dans l'acte le plus simple, la consommation non dans la croyance et l'illusoire. [...]
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