Commentaire composé de la fable "Les Obsèques de la Lionne" de La Fontaine.
[...] Le Cerf habile Le Cerf souligne la férocité, l'excès et la démesure des souverains: la colère du Roi est "terrible" et le violence de la Reine mise en valeur par l'enjambement "Etranglé". Mais le Cerf doit taire ses pulsions afin de sauver sa vie. Dans son récit, il représente la Reine cruelle par simple vanité féminine. Il apaise avec habileté la colère du Roi, mais aussi son chagrin en évoquant les "mille charmes" que goûte la lionne dans l'au-delà. Il le fait même sourire en évoquant la coquetterie de la Reine. En vrai courtisan intelligent, il maîtrise la force de son discours et connaît le pouvoir des mots. [...]
[...] Ainsi, La Fontaine suggère au lecteur la force du discours par la forme de la fable. Humour du fabuliste Afin de plaire à ses lecteurs et de bien montrer que c'est le comportement des hommes qui est décrit, La Fontaine passe constamment du registre animal au registre humain. Ainsi, dans une histoire de félins, les termes obsèques, femme, temple, Prince, Province, Prévôts, Courtisans, Monarque, "digne moitié", patois font sourire le lecteur. Le lion s'exprime avec solennité en employant le "nous", pluriel emphatique, et des expressions telles que "membres profanes" ou encore "augustes mânes". [...]
[...] Ainsi, le lion organise avec soin les obsèques de "sa digne moitié": "un tel jour", "un tel lieu", "pour régler la cérémonie" . S'il est peiné, le Roi joue malgré tout un rôle devant la cour, privilégiant le paraître à l'être: "le Prince aux cris s'abandonna" (on peut noter dans cette phrase des assonances en et en formant une harmonie imitative). Le terme "patois" fait sans doute référence au langage compliqué des courtisans flatteurs et donc au ridicule de leurs manières. [...]
[...] Les apartés du moraliste sont très sévères et pourtant, lorsque celui-ci fait parler le cerf, il semble oublier sa rancoeur. Les personnages de la fable, tout comme le lecteur, se laissent prendre au charme de l'apparition et du discours. Ainsi la fable apparaît comme une invitation à la réflexion mais aussi au plaisir de la lecture et d'un certain côté le cerf représente le fabuliste dans ce récit imaginaire. II) Talent du psychologue Le cérémonial de la Cour Le monde animal de cette fable reflète point par point la Cour du XVIIème siècle, régie par un puissant protocole. [...]
[...] La Fontaine dépeint les hommes comme tellement enfermés dans leur amour- propre qu'ils ne se rendent pas compte qu'on les manipule, montrant ainsi la faiblesse des hommes à travers celle du Roi. La hardiesse du propos, notamment concernant les courtisans, annonce Saint-Simon à la fin du XVIIème siècle, qui observera la Cour avec un regard cruel et cynique. Mais la critique reste souriante car elle montre la puissance du discours, qui est malgré tout très agréable. En effet, le discours du cerf, comme celui du fabuliste, est beau à entendre et nous entraîne dans l'univers du rêve. Comme le dit Cocteau, "Ce beau mensonge ne nous dit-il pas la vérité?". [...]
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