La scène 10 de La Guerre de Troie n'aura pas lieu ? qui occupe une place stratégique dans la pièce - est la scène conclusive de l'Acte I mais elle n'est pas précisément le moment exactement central de la pièce, puisque l'Acte II comporte 14 scènes. C'est une scène qui répond à la scène introductrice de l'acte, puisque tout comme dans la scène liminaire de la pièce, ce sont deux femmes qui sont en présence et qui s'expriment. L'élément qui permet de rendre cette scène unique est de la paix, élément pivot autour duquel s'articule l'échange verbal.
[...] Cassandre affirme et réaffirme sa non-voyance, stricto sensu : - Lire la réplique 1 (coloré ou terne) renvoie au passage de la scène précédente dans laquelle Hélène affirme et réaffirme ne rien voir : la scène du retour, version colorisée ou noir et blanc. Puis cette non- voyance se poursuit dans la réplique : Moi, je suis comme un aveugle . fois le terme de aveugle 2 fois la notion tactile). Cassandre privilégie la sensation tactile "je tâte" "à tâtons" ou la sensation émotionnelle "chaque être pèse sur moi" "à l'angoisse de mes veines". Cassandre intériorise le phénomène qui semble relever d'une intuition. Réplique 2 d'Hélène : Moi, je . [...]
[...] mais non dans les répliques des personnages. Il s'agirait donc d'une paix universelle. En l'incarnant sous l'apparence d'une femme, il la rend concrète, plus proche du moment présent de l'histoire racontée, sous-tendant l'histoire à laquelle appartient Giraudoux. L'apparition de la Paix pose le problème de l'occupation sur scène ; elle vient d'où ? Des coulisses ? d'un rideau tiré, perpendiculaire à la scène, qui ferait que le public la verrait avant qu'elle ne soit appelée par Cassandre ou bien le public la découvre-t-il en même temps que les deux personnages féminins qui sont déjà sur scène ? [...]
[...] Cet échec dans la tentative de séduction est confirmé par Cassandre comme si, dans un langage familier et imagé, Cassandre a l'air de dire : Ce n'est pas la peine d'en faire tant Hélène ne te voit pas: Pourtant c'est Cassandre, comme médiatrice, qui prend à son compte la non vision d'Hélène, à la réplique 17 - comme si cela était une évidence que Hélène ne puisse voir la paix, et que Cassandre le sache. Se fait jour tout un jeu sur l'indicible et l'invisible. Pour Cassandre, tout ceci entre bien dans son schéma de pensée puisque depuis la scène elle affirmait déjà que la paix était impossible. Elle demeure donc dans la logique et sur ses positions. [...]
[...] La polysémie de fatal éclaire la lecture : Marqué par le destin en promettant à Pâris l'amour de la plus belle femme du monde, Vénus a tissé la trame de la relation adultère Hélène- Pâris ; d'ailleurs "cette main de la fatalité qui pèse sur moi" est largement exploitée dans l'opéra d'Offenbach dont Hélène est éponyme. Elle est volage mais quoi de plus normal pour la fille d'un oiseau ? Et est-ce sa faute à elle si Vénus est entrée dans le jeu et qu'elle prend plaisir à faire cascader la vertu de cette pauvre Hélène. [...]
[...] La guerre porteuse de misère et de souffrances. Cette intrusion de la paix permet d'organiser la scène autour d'une construction de répliques, excluant la conversation à trois sur le schéma suivant : Hélène/la paix Hélène-Cassandre + Paix-Hélène La paix/Cassandre 4+4. Le principe du 2 à 2 est maintenu tout au long de la scène dans une parfaite similitude. C'est Hélène qui ouvre ; c'est Cassandre qui ferme. Chacune d'entre elles est tour à tour la locutrice privilégiée de la paix., mais Hélène ne parle jamais directement à la paix ; La communication entre Hélène et la Paix ne passe pas : La paix dit à Hélène et la nomme ; Hélène répond par "elle" et ne lui parle pas. [...]
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