L'oeuvre dont est extrait le présent texte est un poème intitulé Charme (Carmen) pour le roi Robert. Plus que d'un discours (puisqu'il n'a, semble-t-il, jamais été prononcé), il s'agit d'un poème politique adressé au roi capétien Robert II le Pieux aux environs de 1025. L'auteur en est Adalbéron, évêque de Laon, neveu de l'archevêque Adalbéron de Reims. Il appartenait à un très puissant lignage : il était de sang royal, affilié à la fois aux Carolingiens (il était descendant des ancêtres de Charlemagne) et aux Capétiens (il était cousin germain des Ducs de Lorraine). Après avoir été chanoine de Metz, il fut établi en 977 évêques de Laon par Lothaire. C'est donc vers la fin de sa vie que cet homme, rattaché par son histoire personnelle et familiale aux deux grandes dynasties et à la tradition des Grands d'Eglise soutien du trône, rédige ce poème politique, qui par bien des aspects peut être vu comme une exorde adressée au roi Robert (...)
[...] La fonction que leur assigne Adalbéron est de combattre, de porter les armes. Mais le texte va plus loin que cette simple description objective : non content de porter les armes, le noble doit les utiliser à bonne escient, il s'agit pour lui de défendre les grands et les petits de protéger tout le monde Plus encore, il s'agit d'être le protecteur des églises de mettre son épée au service du Christ. Il ne suffit donc pas d'être armé pour être noble, encore faut-il adhérer à une certaine éthique militaire, à un certain code de valeurs qui constituent la chevalerie. [...]
[...] Par bien d'autres aspects, le texte soulève des questions. Tout d'abord, les différents ordres que décrit Adalbéron ne semblent pas prendre en compte toute la réalité de l'époque. Il divise les catégories des laïcs en serfs et nobles Mais qu'en est-il des paysans libres, des vilains, des hommes de la poesté, des bourgeois des villes, de tous ces hommes qui comme les serfs peuvent avoir des devoirs envers des seigneurs ou des abbayes, et qui comme les nobles ont le statut d'hommes libres? [...]
[...] Dans le même temps cependant, Adalbéron insiste sur l'idée que la hiérarchie ecclésiastique s'est vu confier par Dieu l'ordonnancement du genre humain tout entier sans en exclure aucun grand c'est-à-dire pas même le roi. Il existe donc, dans la société décrite par Adalbéron, une prédominance des clercs sur les serfs et les nobles. Il y aurait donc d'une part les clercs, d'autre part les laïcs, placé sur deux plans différents, puisque les seconds seraient soumis aux premiers. La description d'Adalbéron est n'est donc pas sans soulever de questions. [...]
[...] Leur fonction, leur charge, leur ministère est l'élément qui différencie les clercs, considérés comme de condition égale, quelque soit la différence de nature ou de rang de leur naissance. Ils sont, en effet, organisés en une hiérarchie directement établie par Dieu Dieu a établit l'Eglise et ses ministres dont il a réglée la hiérarchie et, à l'inverse des laïcs, sont soumis à la loi divine et non à la loi humaine Les hommes de la société féodale, tel que le texte les décrit, sont assujettis à deux lois différentes : l'une, la loi divine, ne fait pas de différence entre ses ministres et les considèrent comme égaux de conditions, et définis uniquement par leur fonction dans la société (ils sont ceux qui orant) et par la hiérarchie de leurs charges ; l'autre, la loi humaine dont parle le texte, distingue, en revanche, différentes conditions et statuts. [...]
[...] Pourtant, le texte même de cette description n'est pas sans soulever de nombreuses questions. II Une description ambiguë Sous de nombreux aspects, le texte n'est peut-être pas aussi simple qu'il y parait au premier abord. De nombreuses questions se posent entre les lignes. Tout d'abord, Adalbéron décrit d'une manière quelque peu ambiguë les rapports qu'entretiennent les trois ordres En second lieu, une trop grande simplification et une certaine imprécision dans la délimitation des différents ordres forcent à s'interroger sur la réalité de la société décrite par Adalbéron. [...]
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