Une fiche de lecture de 2 pages sur l'ouvrage de P d'IRIBARNE, qui analyse la 'société de rang' française
[...] La possession d'un diplôme, véritable titre de noblesse reste un enjeu primordial puisque de lui dépendra la place occupée dans la hiérarchie sociale. Compromis entre mérite et égalité, l'élitisme républicain a longtemps fonctionné de manière satisfaisante car il reposait sur la reconnaissance d'une diversité naturelle des talents et des aptitudes légitimant une division hiérarchique entre filières de haut niveau intellectuel et filières manuelles. Dans la pratique, on combine égalité formelle (des lycées, des diplômes universitaires) et inégalités réelles, avec des hiérarchies officieuses que nul n'ignore et qui sont les rouages d'une société de rangs, où l'on déroge au principe démocratique en fondant une aristocratie des talents. [...]
[...] Toutefois, cette noblesse du métier exclut par définition tous les chômeurs, les précaires, les sans statuts En outre, les lettres de noblesse ne sont pas à l'abri d'une remise en cause : les cadres voient ainsi avec désarroi s'estomper la frontière qui les sépare des salariés ordinaires. Les rapports de travail échappent à une stricte logique contractuelle. L'idéal de service noble trouve en France sa consécration dans le service public, d'abord parce qu'on y sert ici l'intérêt général, sans dépendance envers les usagers ensuite parce qu'on accède à un statut synonyme d'autonomie professionnelle et de privilèges. En ce qui concerne les conditions de travail, on retrouve la même singularité française. [...]
[...] Héritière de l'Ancien Régime, on la retrouve aussi bien dans l'élitisme républicain que dans l'existence d'un honneur professionnel porteur de devoirs la vision cléricale célèbre une humanité indifférenciée, ayant aboli tous les particularismes et les distinctions (national/étranger, homme/femme, riche/pauvre) : la véritable noblesse consiste alors à accéder aux sphères de l'esprit, où règne l'idéal d'égalité et l'universalisme (idéal du citoyen guidé par la raison). Entre ces deux visions, l'opposition est irréductible. La France vit ainsi dans une sorte de symbiose conflictuelle entre le désir de grandeur et l'idéal d'égalité De la société de rangs au monde du travail En France, les droits et les obligations d'un employé sont moins définis par un contrat que par les traditions du métier. [...]
[...] Toute tentative de remettre en cause cette rigidité des salaires se heurte à une levée de boucliers des syndicats, qui voient se préfigurer une soumission à l'arbitraire du chef d'entreprise. Face à la mondialisation, qui sape les fondements de l'univers mythique français, l'éradication des statuts et des droits acquis pourrait peut-être passer par une nouvelle nuit du 4 août, une abolition renouvelée des privilèges Mais c'est oublier que nous sommes dans une situation de front renversé par rapport à 1789 : ce ne sont plus les dominants mais les dominés qui s'accrochent à leurs avantages acquis et qui se sentent menacés par l'avènement d'un monde ouvert. [...]
[...] L'Etrangeté française Philippe d'Iribarne Chaque société possède un univers mythique qui fonde son organisation. Toutes les singularités françaises qui forgent notre étrangeté tour à tour vantées ou brocardées, trouvent leur origine, selon Philippe d'Iribarne (directeur de recherche au CNRS), dans une conception originale de la liberté qui privilégie l'honneur. Une conception de la liberté attachée en France à l'honneur Toutes les sociétés modernes ont mis en avant la liberté comme droit fondamental de l'homme, mais la conception de cet idéal diffère d'une culture à l'autre : en Angleterre et aux États-Unis, l'idée de liberté est intimement liée à celle de propriété : est libre le propriétaire, protégé par la loi contre tout empiètement sur ses biens ou sa personne. [...]
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