poésie, quête intérieure, modernité poétique, genre littéraire, Paysages poétiques
Problématisation : élucider les relations (« et ») entre le genre littéraire et une démarche d'ordre spirituelle, existentielle. Idée essentielle est que la poésie met en œuvre un langage spécifique, une construction verbale qui est le moyen, pour le poète, d'accéder, et de faire accéder son lecteur à une vérité et à un rapport singuliers au monde.
La nature de la quête peut être érotique, au sens large : c'est la poésie amoureuse. Mais s'agissant de la poésie lyrique, il faut bien penser que le poète exprime une expérience qui relève de l'universel cf Hugo, préface des Contemplations : « Prenez donc ce miroir, et regardez-vous y. On se plaint quelquefois des écrivains qui disent moi. Parlez-nous de nous, leur crie-t-on. Hélas ! quand je vous parle de moi, je vous parle de vous. » La joie de l'amour, l'angoisse face au temps qui passe, l'émotion devant la beauté de la Nature, le désespoir de la perte : expériences fondamentales de l'humanité.
[...] Il est nomothète : législateur d'un langage plus authentique dans le lien qu'il tisse entre les mots et les choses. Cette remotivation de l'arbitraire du langage peut passer dans un premier temps par une destruction du langage usuel (Rimbaud Après le Déluge et l'identification du poète à la fois à une divinité dévastatrice et à Noé), par une transgression des normes grammaticales, lexicales, logiques (cf la notion d' écarts poétiques qui définiraient, selon les théoriciens Laufer et Lecherbonnier, la spécificité du langage poétique). [...]
[...] Rimbaud va plus loin encore en exécutant le caractère personnel de la poésie lyrique traditionnelle : dans Les Ponts ou Villes la voix poétique s'efface pour laisser place au spectacle du monde extérieur dans un style impersonnel. Par ailleurs, l'affirmation Je est un autre anticipant sur les découvertes de la psychanalyse, proclame la faillite du moi qui était au cœur des effusions lyriques depuis Lamartine[1]. Si la subjectivité est au centre de la création poétique, elle prend désormais la forme d'une exploration de ‘l'inconnu', d'un continent intérieur auquel Rimbaud accède par un exercice de Voyance qui recourt à un usage discipliné des stupéfiants. [...]
[...] A l'inverse, il s'en émancipe cf : les postulats esthétiques contenus dans le titre du recueil de Baudelaire, Les Fleurs du Mal et dans l'art poétique que constitue l' Hymne à la Beauté Que tu viennes du ciel ou de l'enfer, qu'importe et la poésie rimbaldienne de la Révolte, l'avènement d'une Beauté qui n'exclut ni la violence, ni l'exploration des fantasmes avec une dimension fortement sexuelle comme l'indique le poème- art poétique Being Beautious dans Les Illuminations. Je cherche à m'encrapuler le plus possible dit Rimbaud dans sa correspondance, avant de retracer les expériences-limites vécues à Londres avec Verlaine dans un long poème en prose au titre éloquent : Une Saison en enfer. Voilà un programme à la fois existentiel et esthétique qui tourne le dos on ne peut plus explicitement à la tradition. [...]
[...] La préface du Spleen de Paris de Baudelaire théorise la vocation de la poésie moderne, dans une prose souple et heurtée à peindre les ruptures, les bizarreries de la grande cité fourmillante. Sur le plan de l'esthétique, on retrouve d'une certaine façon les caractéristiques de l'Impressionnisme en peinture (2e moitié du XIXe), qui tente de restituer les sensations produites par le monde extérieur sur la sensibilité de l'artiste par la lumière, les variations atmosphériques et l'impression parfois confuse ou chaotique laissée par le contact avec les espaces naturels et artificiels Les Ponts Dernière caractéristique notable de la poésie moderne : sa dimension spéculaire, auto-réflexive. [...]
[...] Il théâtralise aussi l'invention verbale, les jeux sur le signifiant que met en jeu l'écriture poétique, notamment par un travail sur l'étymologie, la polysémie. Dans Icebergs Michaux allégorise un espace intérieur, celui du recueillement du poète qui est aussi une forme de mort au monde, d'exploration des confins de la psyché, frangée de danger, qui s'apparente à la tentative de catabase d'Orphée, figure tutélaire du Poète. J'ai fait descendre la Muse du mont Parnasse, et lui ai donné, au lieu d'une lyre à sept cordes de convention, les fibres-mêmes du cœur humain écrit Lamartine dans la préface des Méditations poétiques Voir Baudelaire, L'homme des foules dans Le Spleen de Paris, et A une passante dans la section Tableaux parisiens des Fleurs du Mal. [...]
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