Ce dialogue entre la Maréchale et Diderot est assez particulier. En effet, si en apparence il semble dialectique, il est en réalité didactique puisque Diderot cherche à amener son interlocutrice à partager son point de vue.
- Si l'on considère l'entretien dans son ensemble, il semblerait que Diderot et la Maréchale cherchent ensemble, en coopérant et en confrontant leurs points de vue, à résoudre un problème (quelle place accorder à la religion ?) et à formuler une vérité (la religion est-elle ou non dangereuse ?) (...)
[...] - Très aisément ; dites-moi, si un misanthrope s'était proposé de faire le malheur du genre humain, qu'aurait-il pu inventer de mieux que la croyance en un être incompréhensible sur lequel les hommes n'auraient jamais pu s'entendre, et auquel ils auraient attaché plus d'importance qu'à leur vie ? Or, est-il possible de séparer de la notion d'une divinité l'incompréhensibilité la plus profonde et l'importance la plus grande ? LA MARÉCHALE. - Non. DIDEROT. - Concluez donc. LA MARÉCHALE. - Je conclus que c'est une idée qui n'est pas sans conséquence dans la tête des fous. [...]
[...] - Ce genre permet à Diderot de montrer toutes les failles du raisonnement de la maréchale si l'on peut d'ailleurs parler de raisonnement. Il met en lumière la navrante naïveté de cette dernière, son caractère craintif et quelque peu intéressé. - Avec le dialogue, l'auteur de La Religieuse montre toute sa maîtrise du discours argumentatif. Il feint un dialogue dialectique pour mettre en lumière les limites rhétoriques de la maréchale. Il use de la langue pour mieux mettre en exergue les apories de son raisonnement. [...]
[...] En fait, il n'y a pas, chez elle, de réelle démarche argumentative, de démonstration, de raisonnement. Soit elle pose des questions, soit elle tire les conclusions des différents développements de Diderot je conclus . lignes 27-28, je comprends ; c'est que ) soit elle s'oppose à lui ou tente de s'opposer mais son propos est sans fondements, sans appuis, sans force : cela ne se peut voilà bien les abus mais ce n'est pas la chose On reste dans une opposition pauvre, enfantine. [...]
[...] - Mais, madame la maréchale, est-ce qu'il y a des chrétiens ? Je n'en ai jamais vu. LA MARÉCHALE. - Et c'est à moi que vous dites cela, à moi ? DIDEROT. - Non, madame, ce n'est pas à vous ; c'est à une de mes voisines qui est honnête et pieuse comme vous l'êtes, et qui se croyait chrétienne de la meilleure foi du monde, comme vous le croyez. LA MARÉCHALE. - Et vous lui fîtes voir qu'elle avait tort ? [...]
[...] - Diderot expose habilement son opinion et tente, en fait, d'amener la Maréchale à reconsidérer la sienne. - Le caractère didactique de cet entretien est particulièrement visible. Il y a en effet de nombreux verbes de réflexion, de pensée : croyez- vous songez (trois occurrences), concluez vous pensez je comprends On notera également la présence de verbes de démonstration : montrerez-vous fîtes voir vous y prîtes- vous - On notera enfin que la Maréchale pose beaucoup de questions à Diderot (près d'une dizaine) ce qui met en lumière bien évidemment sa position d'apprenant : Diderot, par ses connaissances, sa culture et sa réflexion ayant une supériorité une autorité sur elle. [...]
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