Molière, "Dom Juan", Acte III scène 2 : la scène du pauvre - publié le 30/07/2009
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C'est au nom des bienséances que Dom Juan, comme Tartuffe auparavant, a été censuré sous l'influence du parti dévot : les exigences du bon goût interdisaient qu'une pièce se joue des mystères sacrés de la religion. La scène 2 de l'acte III, dite du pauvre, fait partie de celles que Molière a dû retoucher en supprimant certain passages jugés scandaleux.
Rappelons que Sganarelle, déguisé en médecin, vient de tenter de démontrer la nécessité de croire, choqué par le "Je crois que deux et deux sont quatre et que quatre et quatre sont huit" de son maître. Mais le raisonnement burlesque du valet a ridiculisé son propos. Les deux hommes, égarés dans la forêt, rencontrent un ermite à qui ils demandent leur chemin (...)
Sommaire
Introduction
I) Un affrontement manichéen
A. La figure du pauvre B. La figure démoniaque de Dom Juan C. La victoire du pauvre
II) L'enjeu idéologique
A. Une provocation à Dieu B. La fonction du valet
III) Une scène dramatique et pathétique
A. Une scène construite sur la gradation, la montée du blasphème et de la provocation B. Ce jeu humiliant : le pauvre, un personnage pathétique C. La victoire partagée 1. Une courageuse et digne résistance 2. Le triomphe relatif de Dom Juan
Conclusion
Extrait étudié
ACTE III, scène 2 - Dom Juan, Sganarelle, Francisque.
SGANARELLE. Enseignez-nous un peu le chemin qui meine à la Ville.
LE PAUVRE. Vous n'avez qu'à suivre cette route, Messieurs, et détourner à main droite quand vous serez au bout de la forest. Mais je vous donne avis que vous devez vous tenir sur vos gardes, et que depuis quelque temps, il y a des voleurs icy autour.
D. JUAN. Je te suis bien obligé, mon amy, et je te rends graces de tout mon coeur.
LE PAUVRE. Si vous vouliez, Monsieur, me secourir de quelque aumosne.
D. JUAN. Ah, ah, ton avis est interessé à ce que je vois.
LE PAUVRE. Je suis un Pauvre homme, Monsieur, retiré tout seul dans ce bois depuis dix ans, et je ne manqueray pas de prier le Ciel qu'il vous donne toute sorte de biens.
D. JUAN. Eh, prie-le qu'il te donne un habit, sans te mettre en peine des affaires des autres.
SGANARELLE. Vous ne connoissez pas Monsieur, bon homme, il ne croit qu'en deux et deux sont quatre, et en quatre et quatre sont huit.
D. JUAN. Quelle est ton occupation parmy ces arbres ?
LE PAUVRE. De prier le Ciel tout le jour pour la prosperité des gens de bien qui me donnent quelque chose.
D. JUAN. Il ne se peut donc pas que tu ne sois bien à ton aise ?
LE PAUVRE. Helas, Monsieur, je suis dans la plus grande nécessité du monde.
D. JUAN. Tu te moques, un homme qui prie le Ciel tout le jour ne peut pas manquer d'estre bien dans ses affaires.
LE PAUVRE. Je vous asseure, Monsieur, que le plus souvent je n'ay pas un morceau de pain à mettre sous les dents.
D. JUAN. Voila qui est étrange, et tu es bien mal reconnu de tes soins ; ah ah, je m'en vais te donner un Louis d'or tout à l'heure pourveu que tu veuilles jurer.
LE PAUVRE. Ah, Monsieur, voudriez-vous que je commisse un tel péché ?
D. JUAN. Tu n'as qu'à voir si tu veux gagner un Louis d'or ou non, en voici un que je te donne si tu jures, tiens il faut jurer.
LE PAUVRE. Monsieur.
D. JUAN. A moins de cela tu ne l'auras pas.
SGANARELLE. Va, va, jure un peu, il n'y a pas de mal.
D. JUAN. Prens, le voila, prens te dis-je, mais jure donc.
LE PAUVRE. Non Monsieur, j'ayme mieux mourir de faim.
D. JUAN. Va va,] je te le donne pour l'amour de l'humanité. Mais que voy-je là, un homme attaqué par trois autres ? la partie est trop inégale, et je ne dois pas souffrir cette lascheté.
Introduction
I) Un affrontement manichéen
A. La figure du pauvre B. La figure démoniaque de Dom Juan C. La victoire du pauvre
II) L'enjeu idéologique
A. Une provocation à Dieu B. La fonction du valet
III) Une scène dramatique et pathétique
A. Une scène construite sur la gradation, la montée du blasphème et de la provocation B. Ce jeu humiliant : le pauvre, un personnage pathétique C. La victoire partagée 1. Une courageuse et digne résistance 2. Le triomphe relatif de Dom Juan
Conclusion
Extrait étudié
ACTE III, scène 2 - Dom Juan, Sganarelle, Francisque.
SGANARELLE. Enseignez-nous un peu le chemin qui meine à la Ville.
LE PAUVRE. Vous n'avez qu'à suivre cette route, Messieurs, et détourner à main droite quand vous serez au bout de la forest. Mais je vous donne avis que vous devez vous tenir sur vos gardes, et que depuis quelque temps, il y a des voleurs icy autour.
D. JUAN. Je te suis bien obligé, mon amy, et je te rends graces de tout mon coeur.
LE PAUVRE. Si vous vouliez, Monsieur, me secourir de quelque aumosne.
D. JUAN. Ah, ah, ton avis est interessé à ce que je vois.
LE PAUVRE. Je suis un Pauvre homme, Monsieur, retiré tout seul dans ce bois depuis dix ans, et je ne manqueray pas de prier le Ciel qu'il vous donne toute sorte de biens.
D. JUAN. Eh, prie-le qu'il te donne un habit, sans te mettre en peine des affaires des autres.
SGANARELLE. Vous ne connoissez pas Monsieur, bon homme, il ne croit qu'en deux et deux sont quatre, et en quatre et quatre sont huit.
D. JUAN. Quelle est ton occupation parmy ces arbres ?
LE PAUVRE. De prier le Ciel tout le jour pour la prosperité des gens de bien qui me donnent quelque chose.
D. JUAN. Il ne se peut donc pas que tu ne sois bien à ton aise ?
LE PAUVRE. Helas, Monsieur, je suis dans la plus grande nécessité du monde.
D. JUAN. Tu te moques, un homme qui prie le Ciel tout le jour ne peut pas manquer d'estre bien dans ses affaires.
LE PAUVRE. Je vous asseure, Monsieur, que le plus souvent je n'ay pas un morceau de pain à mettre sous les dents.
D. JUAN. Voila qui est étrange, et tu es bien mal reconnu de tes soins ; ah ah, je m'en vais te donner un Louis d'or tout à l'heure pourveu que tu veuilles jurer.
LE PAUVRE. Ah, Monsieur, voudriez-vous que je commisse un tel péché ?
D. JUAN. Tu n'as qu'à voir si tu veux gagner un Louis d'or ou non, en voici un que je te donne si tu jures, tiens il faut jurer.
LE PAUVRE. Monsieur.
D. JUAN. A moins de cela tu ne l'auras pas.
SGANARELLE. Va, va, jure un peu, il n'y a pas de mal.
D. JUAN. Prens, le voila, prens te dis-je, mais jure donc.
LE PAUVRE. Non Monsieur, j'ayme mieux mourir de faim.
D. JUAN. Va va,] je te le donne pour l'amour de l'humanité. Mais que voy-je là, un homme attaqué par trois autres ? la partie est trop inégale, et je ne dois pas souffrir cette lascheté.
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Extraits
[...] La victoire partagée Une courageuse et digne résistance - Sa résistance est digne car il ne renie pas sa foi je préfère mourir de faim Bien que placé dans une position de faiblesse à cause de sa pauvreté, il triomphe du tentateur dont le chantage a échoué. Le mécréant n'a pas réussi à convertir l'âme pure de ce croyant zélé. Cependant, il hésite un bref instant au moment le plus fort de la scène. Le triomphe relatif de D.J - Il triomphe à sa façon car, il a démontré l'impuissance de dieu à secourir le Pauvre et a pris plaisir à faire souffrir un homme déchiré entre sa foi et son espoir de gain. [...]
[...] Cela explique peut-être le geste final de D.J qui, ne s'estimant pas totalement vainqueur, pour sauver la face, dans un réflexe aristocratique court au secours d'un homme tomber dans une embuscade. Conclusion : Ainsi, nous avons pu constater la puissance de cette scène où l'impie D.J bafoue la charité et la prière en les rabaissant à des intérêts matériels, et en feignant d'ignorer la dimension spirituelle du choix de l'ermite. Il poursuit son sacrilège en incitant le Pauvre à blasphémer, ce à quoi ce dernier ne cédera pas. Tout l'art de Molière est d'avoir à créer une tension dramatique et à susciter la pitié du spectateur pour le vieil homme. [...]
[...] Il fait preuve de cynisme, en mettant de la logique là où il n'y en a pas comme dans la foi, alors qu'il sait que c'est important pour le pauvre tu te moques - Il se transforme ensuite en tentateur en agitant sous le nez du pauvre un louis d'or, à condition qu'il jure de commettre le péché le plus grave qui réduirait à néant le choix de toute sa vie. En cela on voit toute la cruauté de D.J qui cherche à vaincre la force morale de la foi par la force des besoins du corps. [...]
[...] L'adverbe de quantité un peu tente de minimiser la gravité du blasphème, comme si en jurant vite, on péchait moins. III/ Une scène dramatique et pathétique Une scène construite sur la gradation, la monter du blasphème et de la provocation - Elle est provoqué par la remise en cause du caractère sacré de l'aumône, par les violentes moqueries contre l'inutilité de la prière et par la tentation du louis d'or. Les répliques se font plus brèves et se font au moment le plus fort de la tentation dramatique. [...]
[...] Mais le raisonnement burlesque du valet a ridiculisé son propos. Les deux hommes, égarés dans la forêt, rencontrent un ermite à qui ils demandent leur chemin. En quoi cette scène où un pauvre ermite demande l'aumône à Dom Juan est sacrilège ? C'est ce que nous verrons à travers l'affrontement manichéen où D.J se fait le diable tentateur, mais aussi en étudiant l'intensité pathétique et dramatique de cette scène. Un affrontement manichéen La figure du pauvre - C'est un être de foi. [...]
Lecture analytique de l'acte III scène 2 de Dom Juan de Molière, ou encore appelée "la scène du pauvre". Dans cette scène, Dom Juan nous apparaît comme un être cynique, corrupteur et de plus en plus odieux. Il ose provoquer un homme qui n'a qu'un seul idéal dans sa vie : la religion. Molière met ici en scène un personnage en détruisant les...
- Scène : présence d'un Dom Juan libertin, rationnel et impie. Personnage complètement opposé au mendiant tant par la hiérarchie sociale qu'aux niveaux éthique et idéologique. Le mendiant est un ermite nécessiteux (Les Franciscains faisaient voeu de pauvreté, ils vivaient hors...
Rapidement rédigé, le Dom Juan de Molière fut représenté pour la première fois le dimanche 15 février 1665 au Théâtre du Palais Royal, et vivement applaudi. Cette pièce fait suite à l'interdiction de Tartuffe, du même auteur. Son écriture répond...