Dissertation sur les sortilèges de l'écriture. Le roman et la place de l'écriture dans le roman suscitent différentes interprétations. Certains, comme Martineau et Faguet inscrivent le roman dans une veine réelle, les personnages devant respecter une réalité sociale et psychologique. Claude Simon ne partage pas du tout cette position et lors d'un entretien en 1972, il explique le rôle de l'écriture : c'est de narrer, non pas de donner des « comptes-rendus d'événements », mais d'apporter « sa propre aventure et ses sortilèges ». Dans une longue citation, Claude Simon montre ce que le roman ne doit pas être et narrer (...)
[...] Le vrai rôle de l'écriture est, pour Claude Simon, de narrer ( ) sa propre aventure : que représente cette aventure ? Dans un roman de qualité, Claude Simon ajoute que l'écriture nous narre ( ) ses sortilèges et qu'ils jouent qu'ils fonctionnent : quels sont ces procédés magiques de l'écriture ? Lors de cet entretien, Claude Simon commence par décrire et expliquer tout ce que, selon lui, ne doit pas narrer le roman, tout ce qui n'est pas roman en d'autres termes. [...]
[...] Il décrit parfois (et même souvent) mais les descriptions sont au service du récit, de la dynamique de l'histoire. Le roman ne représente donc pas une sorte d'instantané dénué de vie : ce n'est pas une succession de faits, ni (et surtout pas) une énumération d'événements, sans intrigue, étant là comme objets et non comme acteurs. Le roman est plutôt une interprétation de faits réels, une utilisation ou bien même une transformation d'événements effectifs : Claude Simon le montre bien en évoquant Le Rouge et le Noir de Stendhal, dont il précise que l'auteur a eu l'idée de ce roman en lisant un fait-divers. [...]
[...] Mais le ton, ou si l'on veut, la couleur de ses romans, seront en lien avec l'aventure de sa vie, qu'elle ait été heureuse ou pas : ils peuvent en être le reflet fidèle ou déformé : un auteur heureux parlera de bonheur car c'est son état d'esprit, et un auteur malheureux pourra tout aussi bien parler de bonheur, dans une sorte de souhait, de sublimation de la vie qu'il n'a pas pu avoir. L'aventure que l' écriture nous narre est ce qui donne vie au roman, ce qui lui confère une dynamique. Cette dynamique inclut bien sûr les péripéties, les détours, les chemins de traverse L'élaboration du roman doit apparaître, non pas comme un effort, mais doit dépasser l'effort pour être sublimée en création. L'aventure de tout écriture est, représente l'âme du roman, ce qui lui donne son identité propre, sa personnalité. [...]
[...] Narrer sa propre aventure est l'un des deux rôles primordiaux de l' écriture Le second est, toujours pour l'écriture, de parvenir, sous peine de créer un roman sans intérêt, de nous narrer ses propres sortilèges et de faire en sorte qu'ils jouent L'écriture doit donc nous narrer ces sortilèges. Ces sortilèges nous envoûtent, c'est-à-dire retiennent notre attention, accrochent notre lecture, si l'on peut s'exprimer ainsi. Cela renvoie au style de l'écriture : sortilèges est donc synonyme de procédés d'écriture Ces moyens qui rendent une œuvre attachante (au sens premier du terme) sont nombreux. [...]
[...] Ceci constitue un sortilège qui rend le lecteur attiré. L'originalité est parfois le meilleur des sortilèges que l'écriture nous narre : arrêtons-nous seulement aux titres des romans. Citons André Gide et son roman La Porte Etroite : c'est un titre très évocateur, à la fois rempli de mystère et de surprise, juste assez opaque pour attirer le lecteur et ne pas l'éloigner par un trop grand hermétisme. Il y a aussi l'exemple de L'Etranger de Camus : on peut se demander, étranger à qui ? [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture