Écrit à partir de 1765, le roman de Denis Diderot, Jacques le Fataliste et son maître, place sur la route deux voyageurs, un valet et son maître, qui évoluent dans un monde qui n'est pas complètement étranger au XVIIIème siècle de l'auteur : la position dominante de la noblesse et l'influence d'un clergé loin d'être toujours intègre sont autant d'éléments qui établissent ce lien sans qu'aucune allusion temporelle directe ne soit expressément faite.
Dans ce cadre, la place de la violence est d'abord celle qui relie l'oeuvre à la réalité, à la vérité d'une époque que Diderot s'efforce souvent de critiquer. Elle est en effet le produit d'un contexte social particulier, dans lequel certains hommes sont les vassaux d'autres hommes de manière illégitime ou du moins infondée, comme le montre la supériorité intellectuelle effective de Jacques sur son maître (...)
[...] La violence de la réalité, mise en exergue dans plusieurs épisodes du roman, peut alors permettre au lecteur de prendre conscience de sa marge de manœuvre, réduite en théorie (mais moins strictement en pratique) à néant par Jacques alors qu'elle devient déterminante si l'homme sait transformer un comportement conforme en un comportement moral, bon. [...]
[...] Cette absence de légitimité se caractérise par un exclusif rapport de force lorsqu'il s'agit de se limiter au cadre strict qui définit Jacques en tant que valet : l'autorité du maître lorsqu'il réclame à son valet le comportement dû à sa classe ne repose que sur la menace corporelle. Toutefois, Jacques parvient quelquefois à relativiser cette domination de force : Le maître ( . ) se disposait à tomber sur Jacques à grands coups de bride, lorsque Jacques lui dit: "Tout doux, monsieur, je ne suis pas d'humeur aujourd'hui à me laisser assommer ; je recevrai le premier coup, mais je jure qu'au second je pique des deux et vous laisse là . [...]
[...] Dans ce cadre, la place de la violence est d'abord celle qui relie l'œuvre à la réalité, à la vérité d'une époque que Diderot s'efforce souvent de critiquer. Elle est en effet le produit d'un contexte social particulier, dans lequel certains hommes sont les vassaux d'autres hommes de manière illégitime ou du moins infondée, comme le montre la supériorité intellectuelle effective de Jacques sur son maître. Enfin, la violence pose le problème métaphysique du mal dans un roman certes guidé par la philosophie déterministe mais qui ne peut pour autant se soustraire au Dieu conventionnel de l'époque. [...]
[...] Les injustices, les inégalités entre les hommes, comme la violence faite à la nature elle- même ne peuvent pas être tolérées par le Dieu décrit par la religion ; de plus, le lecteur du XVIIIème affranchit progressivement sa curiosité intellectuelle et l'explication de l'Ancien Testament peut de moins en moins le satisfaire : selon le Livre de Job, en effet, la souffrance imméritée du prophète ne peut s'expliquer qu'en arguant du fait que les voies de Dieu sont mystérieuses et inaccessibles à l'entendement humain. La dimension philosophique du rôle de la violence dans le roman amène alors à nuancer l'apparente adéquation de la pensée de l'auteur et du fatalisme de Jacques. [...]
[...] Diderot s'insurge ainsi contre deux entorses principales que sont l'état clérical et l'hyménée. En effet, l'inspiration religieuse, dit Diderot, est en fait due à une incompréhension de la nature et cause ensuite la contradiction de sa loi : c'est précisément lorsque la nature les sollicite [les jeunes filles et les jeunes garçons], qu'ils embrassent un genre de vie contraire au vœu de la nature D'autre part, le mariage est contre-nature parce qu'il nie l'éphémérité naturelle de l'amour en décrétant une union qui doit durer toute la vie. [...]
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