Commentaire littéraire du poème "Minerai Noir" (1956) de René Depestre, avec un rappel du texte, des notes explicatives, un développement en trois parties et des éléments pour l'introduction et la conclusion.
[...] Le lien entre le génocide des uns et l'esclavage des autres est rendu par la syntaxe de la phrase : deux propositions temporelles + principale Quand / Quand / On se tourna vers le fleuve musculaire de l'Afrique Les v.29-30 récapitulent l'histoire de l'esclavage en en soulignant la permanence jusqu'au présent de l'énonciation : Voilà de nombreux siècles que dure l'extraction / Des merveilles de cette race Tes années de tiges mortes (v.37) est une expression qui rappelle que les esclaves étaient souvent exploités pour la culture de la canne à sucre. Les vers 41-42 font quant à eux directement référence au commerce triangulaire. Complicité de la religion évoquée avec le vers 18. B. [...]
[...] Métaphore du fleuve présente au début du texte pour évoquer l'exploitation des Noirs reprise pour montrer la colère qui grandit : fleuve musculaire ta colère en crues (v.45). Nouvelle signification de la métaphore filée de la mine : l'annonce d'un coup de grisou Mûris ton grisou v.43) Utilisation du futur Nul n'osera plus v.44) qui annonce avec certitude un avenir meilleur et présence de l'impératif Mûris v.43) qui exprime une injonction à la révolte. Enfin, absence de ponctuation, de rimes, hétérométrie et refus de tout mètre classique : cette prise de liberté avec les règles est parfaitement appropriée au cri de liberté formulé ici par le poète. [...]
[...] Toute la société blanche est présentée comme complice. Le poète évoque les différentes personnes qui profitent de l'esclavage et met ainsi en cause l'ensemble de la société : des chimistes (v.12), des dames (v.14), quelque curé (v.18), quelque vaillant capitaine (v.24). Dénonciation implicite de l'absurdité et la folie des Blancs : les vers 1 à 4 soulignent que c'est à cause du massacre des Indiens que les Blancs ont été conduits à un déplacement des Noirs et à leur exploitation. [...]
[...] La fréquence des anaphores crée un effet de lamentation. C. Les privilèges de la race noire L'éloge des Noirs va même jusqu'à un renversement implicite des valeurs : René Depestre ne se contente pas de revaloriser les Noirs mais affirme leur supériorité sur les Blancs par le biais de l'association Noirs / nature / sensualité / beauté en contraste avec le lien Blancs / argent / violence. Proximité des Noirs avec les éléments naturels (eau, terre, minéral, végétal) : fleuve musculaire v.4, toute la terre retentit v.10 et 26, minerai noir v.11, l'ébène minéral v.25 (le poète joue à la fois sur son idée du minerai noir et sur celle de bois d'ébène par laquelle on désignait la traite des noirs), riche végétation des clartés de ton corps v.36, tiges mortes v.37, peuple de fond en comble retourné / Comme une terre en labours v.39-40, peuple défriché v.41. [...]
[...] Harmonie des Noirs et de l'univers là où les Blancs sont présentés comme ceux qui exploitent la nature. III. UN APPEL À LA RÉVOLTE PROCHAINE CONTRE LES BLANCS A. L'ironie contre les Blancs Répétition de Tout juste si (v.12-18) + Ou encore si (v.21) : l'évocation du comble presque atteint passe par des suppositions d'actes ridicules ; la représentation des esclaves noirs comme un minerai est poursuivie à travers des exemples poussés jusqu'à l'absurde. La force de ses vers procède du fait que ce qui est présenté comme une suite de suppositions folles renvoie en fait le lecteur à des horreurs bien réelles perpétrées par les Blancs à l'endroit des Noirs : les expériences faites sur les Noirs, l'utilisation des Noirs comme domestiques au service des dames blanches, la responsabilité de la religion dans l'esclavage, l'utilisation des Noirs comme de la chair à canon (notamment pendant la guerre de 1914-1918), la désignation par les esclavagistes de la traite des Noirs par l'expression du commerce de bois d'ébène Utilisation péjorative de l'adjectif indéfini quelque : quelque curé quelque ( ) capitaine Présence d'adjectifs antiphrastiques : un brave Père Noël quelque vaillant capitaine B. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture