Knives in Hens, Des Couteaux dans les Poules, est la première pièce de David Harrower. L'auteur écossais l'écrit en 1995, et elle a été très rapidement créée en Écosse, puis à l'étranger. Inscrite dans le théâtre contemporain, elle suit ses interrogations sur le langage, la voix, l'oralité. Dans un univers rural, un couple de laboureurs travaille la terre. Face à eux, un meunier éveille la femme au sens du mot, à l'écriture, à l'évasion par le langage. Cette intrigue du trio met en scène l'acquisition du vocabulaire, et ses conséquences (...)
[...] La langue dure décrit un univers dur, peu intéressé par les questions plus larges ou plus difficiles Le fromage est comme la lune ? reçoit comme unique réponse J'en sais plus que toi Tous ces éléments permettent au lecteur de facilement se représenter le cadre de la pièce. L'assise de la pièce est explicite. Néanmoins, les particularités de langage que nous avons déjà vues perturbent la première impression. La rythmicité de l'écriture de la voix demande des efforts pour lire, et il faut parfois observer les mots, leur orthographe, leur conjugaison, les indications de personnages parlants (par exemple pour comprendre qui s'adresse à qui dans les phrases répétées sans pronom : Ai dit es comme un champ ou dire à voix haute et lentement les répliques pour démêler les jeux d'adresses entre les personnages et de sens Tu es comme quoi que ce soit que je veux La lecture est ralentie, et les manques dans la langue obligent à réfléchir sur la langue. [...]
[...] Knives in Hens met en scène l'acquisition d'une langue riche, par le biais de l'écriture dramaturgique de David Harrower. Il s'éloigne de la langue descriptive et utilise des détournements de la grammaire et de la syntaxe pour créer une écriture de la voix, une oralité écrite qui illustre l'environnement réel et mental des personnages. Le lecteur est pleinement intégré au sens de la pièce, puisque l'écriture de l'auteur le pousse à réfléchir au langage, et à réagir selon l'évolution de la langue au cours de la pièce. [...]
[...] En tant que thème, la langue acquiert dès la source de l'oeuvre une dimension centrale, et oriente ainsi le lecteur dans sa découverte du texte et de la manière dont David Harrower l'a écrit. L'écriture de Harrower a des particularités qui mettent en valeur l'oralité. La première, très frappante, est l'absence de pronoms. Si la didascalie n'en présente pas, c'est la première réplique qui fait réellement prendre conscience de ce manque : Suis pas un champ. Comment suis un champ ? Ensuite, cette particularité continue à s'exercer, dans un rythme de lecture très particulier. [...]
[...] Les mots, les thèmes, sont peu nombreux dans Knives in Hens. Le nombre de mots du vocabulaire est limités. Il s'ouvre peu à peu, mais reste restreint et appartenant à peu de champs sémantiques (la terre, l'agriculture . La syntaxe est complexe, elle paraît ne respecter aucune règle précise, des éléments manquent (non seulement les pronoms) : Chevaux te diront ça après brouter Des phrases comme Pas beaucoup au village le connaissent T'as pas vu le champ Les mieux du village inversent ou maltraitent la syntaxe descriptive de la langue écrite, tout en préservant un sens compréhensible. [...]
[...] Dans un univers rural, un couple de laboureurs travaille la terre. Face à eux, un meunier éveille la femme à sens du mot, à l'écriture, à l'évasion par le langage. Cette intrigue du trio met en scène l'acquisition du vocabulaire, et ses conséquences. Intéressée par le théâtre du nord de l'Europe, David Harrower m'a semblé idéal pour découvrir l'écriture que je ne connaissais pas de l'Écosse. Sa première pièce m'a attiré par son titre, et j'ai ensuite beaucoup aimé la lire, fascinée par la description de l'acquisition du langage. [...]
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