Corneille, "L'Illusion comique", Acte III scène 1 : étude linéaire

Résumé du document

Tirade de Géronte (vers 625 à 635) ou comment le père veut imposer sa position dominante sur sa fille. Son autorité s'exprime par différents procédés :

- il use d'abord d'impératifs : "Apaisez", "tarissez".
- par le champ lexical de l'autorité : "ma volonté", "la raison", "il vous faut".
- il l'apostrophe : "Orgueilleuse" v.630, et plus loin dans la scène v.653 "Impudente".
- il a souvent recourt au pronom 'je' pour montrer l'importance de ses décisions : "je connais" v.629, "je pense" v.630.
- (...)

Extraits

[...] Voir les exclamations v et les très nombreuses interrogations dans sa deuxième tirade qui signalent combien l'attitude d'Isabelle lui déplait, l'offusque. Le rythme haché des vers qui martèle son propos. Par exemple v.630. Son raisonnement repose sur 3 arguments : il parle selon sa raison (v.628) et laisse entendre qu'Isabelle n'agit que par caprice. Il est donc du côté du bon sens, du savoir en père soi-disant expérimenté par la vie. il lui refuse le droit de choisir selon ses sentiments et substitue ses propres goûts aux siens (v.630) et pour finir, il poste pour argument qu'Adraste lui plaît. [...]

[...] Mais Corneille renverse le rapport de force (effet baroque, comme dans l'acte I où tout est renversé, et conception moderne des relations) grâce à la personnalité d'Isabelle qui tient tête à son père et ne sa tait (sans céder) qui devant l'arbitraire de son autorité. D'autre part, cette scène est riche d'enseignement. La dimension du théâtre dans le théâtre permet de comprendre sa portée pour Pridamant qui voit sous se yeux la caricature d'un père tyrannique et qui se trompe (il est toujours présent sur le devant de la scène aux côtés d'Alcandre). C'est ce qu'on appelle une mise en abyme. Ce principe de mise en perspective d'un motif (d'une situation, d'un comportement . ) est très présent dans l'écriture de nombreuses scènes. [...]

[...] elle conclut son argumentation (v.649, 652) en déclarant implicitement que son père sera puni de vouloir aller contre la volonté de Dieu. Le champ lexical de la bataille pose le père en contestataire de l'ordre : l'attaquer en rebelle . coups, âpres malheurs Au cours de cette réplique, Isabelle a retourné à son avantage la thématique de l'autorité pour faire de Géronte un père qui désobéit au ciel (le XVIIe siècle est profondément religieux). Sa réplique est donc profondément contestataire. [...]

[...] Mais si elle se présente ansi c'est dans le but de renverser la situation. Par exemple, si elle use du 636,640) pour préciser sa position, elle utilise au contraire le pour désigner Géronte de manière à ne pas le mettre en cause directement lorsqu'elle fait référence au ciel 647). La stratégie d'Isabelle lui permet de contester intelligemment la position de son père. elle ne dénigre pas Adraste 636, 637) ; elle dit aussi qu'elle voudrait bien obéir à son père si elle le pouvait 640). [...]

[...] L'Illusion comique de Corneille passage étudié : Acte III scène première Géronte, Isabelle. Situation : Adraste qui a vu ses avances (bien maladroites) repoussées avec vigueur par Isabelle, a mis ses menaces à exécution d'aller trouver son père (Géronte) pour obtenir raison, c'est-à-dire la main d'Isabelle. Géronte en bon père de famille croit voir en Adraste, qui présente à ses yeux certaines qualités surtout celle de ses origines et de sa fortune, un gendre tout à fait honorable pour sa fille. [...]