Le Double est le second roman de l'écrivain russe Fédor Mikhaïl Dostoïevski. Il vient juste après le succès des Pauvres Gens, et fait quelque peu retomber Dostoïevski dans l'anonymat. Le Double ouvre une thématique qui sera récurrente et sans cesse approfondie dans la suite de l'œuvre de Dostoïevski : celle du double, du dédoublement de l'identité et de la personnalité. Les pages 12 à 16 sont un passage du premier chapitre du roman. On peut considérer cet extrait comme une scène de préparation. Elle est préparation par son contenu propre : elle présente le protagoniste, M. Goliadkine, qui se prépare et se rend quelque part en calèche. On passe d'abord d'une scène intérieure (il se sustente, se lave, s'habille longuement avec minutie, et se mire dans une glace) à une scène extérieure ensuite, où Goliadkine fait deux rencontres en carrosse (à deux hiérarchies différentes : deux collègues à qui il affiche indifférence et mépris, et un supérieur qu'il considère avec déférence et hésite ou non à le saluer). Cette scène est préparation enfin, car elle préfigure les thèmes de tout le roman : problème d'identité, caractère très versatile du personnage, problème de la hiérarchie abusive de la bureaucratie, Saint-Pétersbourg et son « climat » (météorologique autant que moral).
Comment tous les thèmes centraux du roman sont-ils mis en abyme dans une scène particulière d'ouverture, comment cristalliser la problématique du double dans un épisode de cette sorte ?
L'épisode narre de manière originale à travers les yeux du protagoniste M. Goliadkine, le début d'une journée, un itinéraire donc structuré. Dostoïevski, que l'on entend bien sûr sous la voix du narrateur, procède à la définition et à l'explication d'une classe sociale et d'un monde, celui de la « bourgeoisie de bureau ». On voit dans ce premier chapitre comme l'annonce mise en abyme des thèmes principaux du roman : le double, miroir de l'identité
[...] A la fin, retrouve son caractère fort : lança un regard de défi terrifiant ( ) destiné à réduire en cendres, d'un seul coup, l'ensemble de ses ennemis p.16) = signifie qu'il a comme une ébauche de double personnalité : une personnalité belliqueuse, conquérante et vengeresse (traitée avec grotesque et comique par Dostoïevski) quand il est seul, et quand il est en rapport avec Autrui, il perd tous ses moyens, et acquiert une personnalité angoissée, peureuse, introvertie Un dialogue intérieur : dédoublement (monologue -une écriture intéressante : le narrateur utilise la focalisation interne avec abondance : on est en plein dans les pensées de Goliadkine, presque tout le temps : seuls quelques discours directs (dialogue avec Pétrouchka) viennent émailler ça et là cette suprématie. (effet de cette focalisation interne : impression d'un monologue intérieur. Une chose de sûre : pas de véritable décision : toujours en suspens, en interrogation, en circonlocutions. Monologue = dialogue à une voix. La parole de Goliadkine est peut-être plus trouble que cela encore, il s'agirait plutôt d'un dialogue avec une identité scindée en deux exemple : Je reconnais ou je ne reconnais pas ? ( ) ou bien je fais semblant que je ne suis pas moi ? [...]
[...] Dans ce passage, extrait du premier chapitre du Double (des pages 12 à l'auteur (que l'on peut y confondre avec le narrateur) met en abyme des thèmes qui seront centraux dans toute la suite du roman : la thématique de l'apparence sur laquelle il joue subtilement, en en montrant les travers et les excès (le regard détruit souvent) ; le milieu hiérarchisé et hypocrite d'une classe sociale précise, le monde de la bureaucratie de la Russie impériale ; la problématique de la scission de l'identité et du double, avec le monologue intérieur, interminable et constant de Goliadkine. En outre, ce passage revêt bien sûr le rôle d'introduction de personnages comme autant d'éléments perturbateurs qui détermineront la suite des événements : le serviteur Pétrouchka, des collègues du même département, Andreï Filippovitch son supérieur hiérarchique . tous définis par rapport à Goliadkine. C'est don ainsi que Dostoïevski a posé les fondations de son roman, lequel explorera plus profondément les tenants et les aboutissants de toutes ces considérations. [...]
[...] Finalement, il ne maîtrise rien, car Pétrouchka se moque de lui d'une voix inhabituelle, s'efforçant à grand-peine de se retenir de rire II- Une classe sociale définie Apparence physique primordiale et significative M. Goliadkine, protagoniste, a une occupation principale : son apparence= -soin maladif à sa préparation et à son habillement (champ lexical de la méticulosité et de la précision : à son habillement principal, définitif chemise à petits bouton gilet orné e petites fleurs fort claires une cravate de soie bigarrée p. [...]
[...] ( impression de méthode mais aussi de précipitation (peu de tps consacré à se nourrir : le plus important est de se vêtir convenablement : ses bottes tombent bien flambant neuf et soigneusement brossé fort claires et agréables ; notons la récurrence de l'intensif fort qui accentue l'intention du lecteur sur ce qui, de prime abord, ne sont que des détails, mais ont une importance significative. -suite de verbes d'actions : un lever structuré, on a l'impression que les gestes quotidiens, paradoxalement, se répètent quotidiennement de manière mécanique, et qu'en même temps ils ont une importance capitale car ils semblent régir la vie entière de M. Goliadkine, réglée comme un métronome. la calèche (l'extérieur de Saint-Pétersbourg) M. [...]
[...] point commun aux deux rencontres : malaise de Goliadkine qui ne trouve sa place nulle part, et nulle place ne se justifie à ses yeux. Veut paradoxalement être vu (par ce carrosse) par des passants inconnus, mais quand des visage connus le reconnaissent, il n'assume plus ses actes et se cache = Honte, malaise, usurpation = statut vacillant. Le regard des autres : peut faire exister ou détruire -angoisse fondamentale et principale de Goliadkine : être vu et dénigré. Autrui : à la fois ce qui l'attire le plus et ce qu'il craint le plus car le regard d'autrui est toujours sans pitié. [...]
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