Commentaire organisé de niveau seconde d'un texte d'Antigone. Ce texte de Jean Anouilh est extrait de la pièce de théâtre "Antigone" qui a été écrite dans un contexte particulier : publiée en 1946, mais rédigée entre 1942 et 1944, le temps de l'écriture se situe durant la seconde guerre mondiale. C'est pourquoi à l 'époque, on interpréta Créon comme le théoricien de la collaboration, figurant le Gouvernement de Vichy, apologiste de la Raison d'Etat et Antigone comme le symbole de la Résistance, appelant à la liberté, voire à l'anarchie.
[...] On voit aussi un Créon humain, qui s'emporte parfois et ce langage est un indicateur du réalisme qui est conféré à la pièce : le mythe est ainsi démystifié, il est rapporté à une époque proche de la nôtre, ce qui permet son appropriation. C'est un Créon du vingtième siècle que nous avons ici, il représente le heurt de l'individu et de l'Etat, et le drame qui se joue parce que l'Homme est confronté à un ordre qu'il récuse. Mais que préférera- t-on de Créon et d'Antigone, le réalisme ou la révolte ? [...]
[...] Commentaire organisé d'Antigone, Jean Anouilh Texte : CREON : "Mais bon Dieu ! Essaie de comprendre une minute, toi aussi, petite idiote ! J'ai bien essayé de comprendre, moi. Il faut pourtant qu'il y en ait qui disent oui. Il faut pourtant qu'il y en ait qui mènent la barque. Cela prend l'eau de toutes parts, c'est plein de crimes, de bêtise de misère. Et le gouvernail est là qui ballote. L'équipage ne veut plus rien faire, il ne pense qu'à piller la cale et les officiers sont déjà en train de se construire un petit radeau confortable, rien que pour eux, avec toute la provision d'eau douce pour tire au moins leur os de là. [...]
[...] Il exprime aussi, -peut- être involontairement- ses sentiments : il ressent du dédain pour "toutes ces brutes" qui "vont crever" ; quand il dit "leur peau, leur précieuse peau", il répète ce mot pour insister sur l'adjectif, ce qui relève d'une certaine ironie de sa part, il se moque et l'adjectif devient péjoratif. De même, quand il demande à Antigone "s'il faut dire "oui" ou on peut se demande à quoi ? Oui, être le roi, le dirigeant ? Prendre l'initiative de donner des ordres ? [...]
[...] De plus c'est une question oratoire : Antigone ne peut qu'approuver Créon. Il est très rusé en faisant aussi attention aux pronoms qu'il utilise : après le "J'ai essayé il met le "il ne peut" et après le "Crois-tu", il passe au impersonnel qui lui permet de ne pas s'introduire directement dan la description qu'il fait, de lui donner l'impression d'être hors de portée du crime qu'il va commettre. Créon utilise aussi un balancement très oratoire en faisant l'anaphore de "Et le gouvernail", "Et le mât", "Et le vent", par six fois. [...]
[...] Mais lorsqu'il se met à parler de "gouvernail" ! Dans l'antiquité, en Egypte en particulier (c'est là que se passe l'action), le "gouvernail" n'était qu'une sorte de rame et ne portait pas ce nom. Et lorsqu'il dit "Et le gouvernail est là qui ballote". Le mot "ballote" nous confirme qu'il s'agit de la pièce circulaire du bateau qui permet de le diriger. Or cette pièce n'existait pas dans l'antiquité. Donc on peut penser qu'il s'agit d'une époque plus proche de la nôtre. [...]
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