En décrivant Eldorado avec une surenchère de détails féeriques et l'absence de certaines structures institutionnelles indispensables, en affublant à Candide et Cacambo une candeur qui témoigne de la superficialité de leur découverte, Voltaire suggère une cité trop parfaite qui va rapidement devenir l'occasion d'une comparaison avec la France (...)
[...] Mais cette qualité de vie va servir Voltaire pour faire une critique sévère de la société du XVIIIe siècle, bien réelle celle-là, à laquelle il appartient. Une critique de la monarchie absolue Même si le lecteur n'a qu'une idée vague de la monarchie idéale (aucune évocation de son organisation n'est faite, seulement une proposition de valeurs morales : générosité, justice, travail et culture), la critique du monarque absolu, Louis XIV (plus que de la monarchie), est présente dans la valorisation de Sa Majesté qui sous-entend, par comparaison implicite, la dévalorisation du souverain français. [...]
[...] Le procédé vise avant tout à contourner la censure française. De plus, le genre du conte philosophique allié à celui du roman d'aventure permet de présenter de manière plus vivante une partie des réflexions qui se trouvaient développées sous une forme plus théorique dans l'Encyclopédie, de façon à favoriser leur vulgarisation. Composé de trente brefs chapitres, ce conte est représentatif de l'esprit des Lumières et de leurs grands combats, puisque Voltaire y dénonce en particulier l'optimisme leibnizien, mais également diverses formes d'injustice comme les abus de la religion (chapitre 6 : L'autodafé du pouvoir (chapitre 3 : La guerre ainsi que l'esclavage (chapitre 19 : Le nègre de Surinam Le fil conducteur apparent est celui des voyages et de l'évolution du héros central, Candide, tandis que la logique interne veut qu'il perde progressivement ses illusions. [...]
[...] T E X T E Chapitre XVIII (extrait central) Ce qu'ils virent dans le pays d'Eldorado. Vingt belles filles de la garde reçurent Candide et Cacambo à la descente du carrosse, les conduisirent aux bains, les vêtirent de robes d'un tissu de duvet de colibri ; après quoi les grands officiers et les grandes officières de la couronne les menèrent à l'appartement de Sa Majesté, au milieu de deux files chacune de mille musiciens, selon 5 l'usage ordinaire. Quand ils approchèrent de la salle du trône, Cacambo demanda à un grand officier comment il fallait s'y prendre pour saluer Sa Majesté ; si on se jetait à genoux ou ventre à terre ; si on mettait les mains sur la tête ou sur le derrière ; si on léchait la poussière de la salle ; en un mot, quelle était la cérémonie. [...]
[...] - leur jubilation enfantine lorsqu'ils sautèrent au cou de Sa Majesté (ligne 10) pour le saluer. - la curiosité enfantine qui impose, après Cacambo et le cérémonial avec Sa Majesté, à Candide les multiples interrogations sur les édifices institutionnels du pays (lignes 16 à 18). II- La dénonciation de Voltaire L'utopie se doit de délivrer un message. Si elle donne à voir une cité idéale c'est toujours, plus ou moins explicitement, pour établir par comparaison les travers de la société réelle. [...]
[...] l'accessibilité des sciences à tous, ainsi que le suggère la taille du palais (ligne 19). La défense de la culture et du progrès Elle est emblématique du combat des philosophes des Lumières et est soulignée par l'allusion au palais des sciences (ligne 19) dont la taille d'une seule galerie (deux mille pas) s'oppose à la culture d'une simple minorité. On note également que cette société est soucieuse de l'esthétique de sa cité. La magnificence des bâtiments est soulignée par : .les édifices publics élevés jusqu'aux nues, ligne 12 .les marchés ornés de mille colonnes, ligne 13. [...]
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