L'Etranger est le premier "récit" d'Albert Camus (1913-1960), auteur engagé, humaniste, journaliste et plus jeune prix Nobel de littérature. Terminé en 1940, il ne le publiera qu'en 1942. Il appartient au premier cycle de l'oeuvre de l'auteur, consacré à la philosophie de l'absurde. Ce "roman" connut un succès qui n'a jamais cessé. C'est le personnage principal, Meursault, qui raconte les événements qui l'ont amené à une condamnation à mort (...)
[...] Camus, sans jamais porter un jugement de valeur, évoque le problème de la culpabilité, avant de présenter, dans la seconde partie, celui de la répression et de la justice. Cette péripétie décrit donc un acte absurde, un homme pris une situation qu'il n'avait pas provoquée et qui va lui être fatale. Cette scène très poétique et qui emprunte à la tragédie offre pourtant une certaine vraisemblance, un certain réalisme. Elle traduit également le pessimisme de l'auteur. Le danger dans un monde absurde, c'est que le jugement lui aussi se montre absurde, ce qui sera malheureusement le cas pour Meursault. [...]
[...] Ce récit est écrit au passé, mais le temps de base est le passé composé, un temps de l'oralité, mais qui exprime une certaine neutralité, qui feutre l'événement. C'est ce qui donne un caractère si original à la narration. Par ailleurs, le narrateur n'utilise aucun modalisateur. Il décrit ce qu'il voit, ce qu'il ressent physiquement, mais ce qu'il pense est rarement évoqué ou de façon implicite. Seule l'expression J'ai compris dans ce passage indique une réaction psychologique. C'est le paradoxe de ce récit écrit à la première personne qui refuse le lyrisme. Aucune plainte, aucun remords, il n'y a aucune recherche du pathétique non plus. [...]
[...] Tout mon être s'est tendu et j'ai crispé ma main sur le revolver. La gâchette a cédé, j'ai touché le ventre poli de la crosse et c'est là, dans le bruit à la fois sec et assourdissant que tout a commencé. J'ai secoué la sueur et le soleil. J'ai compris que j'avais détruit l'équilibre du jour, le silence exceptionnel d'une plage où j'avais été heureux. Alors, j'ai tiré encore quatre fois sur un corps inerte où les balles s'enfonçaient sans qu'il y parût. [...]
[...] La première décrivait ses sensations et ses sentiments et les circonstances du meurtre, donc présente ses causes : hasard malheureux, conditions extrêmes. La seconde témoigne de la lucidité du personnage et déjà des conséquences de l'acte. Cette phrase charnière qui emploie un présentatif et rejette en fin de phrase le verbe qui annonce l'écroulement d'un univers vaciller ne laisse aucun doute. Du reste, une expression en parallèle vient le confirmer : c'est là ( ) que tout a commencé avec là aussi un présentatif, un adverbe et le verbe rejeté en fin de phrase. [...]
[...] Le personnage semble en effet subir les éléments, en particulier la lumière et le feu du soleil. Un important champ lexical apparaît dans les sensations tactiles pour souligner l'acuité de la brûlure, avec les expressions rideau . de sel brûlante et ardent avec l'évocation de la sueur et des larmes ou encore avec l'oxymore pleuvoir du feu qui souligne symboliquement la lutte entre l'eau et le feu, et dans les sensations visuelles qui traduisent une agression de la lumière : la lumière a giclé lame étincelante qui m'atteignait au front cette dernière étant à la fois une sensation tactile et visuelle. [...]
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